Mélanie Goffi
Itinéraire
Mes interventions de prédilection depuis une quinzaine d’années portent sur les démarches de développement durable et territoriales. Comment peut-on accompagner les territoires par exemple sur une démarche Agenda 21 ou sur les enjeux climatiques ? En travaillant sur ces sujets, j’ai été amenée à travailler sur des démarches participatives à proprement parler, qui sont devenues le cœur des projets à mon sens. Elles doivent être des démarches de changement et donc appropriées et portées par l’ensemble des acteurs.
Je pense beaucoup l’imbrication des démarches sur un territoire, nous n’avons pas une vision globale aujourd’hui et cela manque à la gouvernance territoriale. C’est très difficile pour les citoyens de se positionner comme acteurs d’une démocratie participative. Il faut au maximum leur donner les garanties d’une information claire et non biaisée et que ce qu’ils produisent fera écho. C’est le minimum que nous puissions proposer aujourd’hui.
Pourquoi à un moment donné les projets de développement durable sont lancés ? Parce que certains acteurs veulent agir, veulent transformer les choses ; si ces démarches sont portées seuls, l’action n’aura pas le même poids. La participation est une condition de la réussite même du projet, une condition du changement : il faut porter collectivement le projet, sinon cela reste un projet parmi d’autres.
Par exemple, pour l’accompagnement sur le plan climat de Paris Saclay, nous nous sommes appuyés sur le design thinking pour renouveler l’expertise participative. Cela permet d’aller au-delà le partage d’un diagnostic et l’identification d’actions possibles et d’aller jusqu’à imaginer une action y compris dans sa mise en œuvre, c’est-à-dire un prototypage de manière participative.
Par ailleurs depuis 2012, je suis garante de concertation à la Commission Nationale du Débat Public (CNDP), j’y ai enrichi ma perception de la participation. C’est une démarche très spécifique de garantir la concertation. C’est à nous d’être attentif au respect des principes de la CNDP, comme le principe d’équivalence : tout le monde doit pouvoir s’exprimer d’où qu’il parle. Les professionnels doivent permettre cela avec leurs compétences et leurs outils.
En tant que garant, il faut adopter une autre posture afin de garantir la bonne information et l’expression de tous, fournir un appui méthodologique, observer les débats, vérifier que les comptes-rendus sont fidèles aux échanges, avoir la capacité à faire de la médiation s’il y a des tensions et enfin établir une cartographie de tous les arguments émis, sans se prononcer sur le fond du projet. Cela va jusqu’à porter le bilan aux instances décisionnelles pour faire le lien avec la concertation. Participation et décision doivent être complètement imbriquées. Cela nous renvoie à la finalité même de la participation.
Message
Je suis fondamentalement convaincue que la participation est inhérente à la démarche, au projet, on ne peut pas faire sans ! Cela revient à se priver d’une condition essentielle de réussite.
Dans un monde idéal, il faudrait que le porteur de projet soit intimement convaincu que la participation est indispensable et qu’il la considère comme partie intégrante de son projet et non comme un « petit plus ».
Il est également nécessaire d’être convaincu de l’apport de l’intelligence collective : c’est toujours plus riche et plus fort à plusieurs, surtout dans un monde aussi complexe que le nôtre, ça n’a pas de sens d’élaborer et de mettre en œuvre seul.
Quand on est au clair avec les objectifs fondamentaux de la participation, c’est-à-dire c’est la contribution à la prise de décision, et non une étape parmi d’autres du projet, peu importe les outils (il en existe énormément), ils ne viennent qu’après dans la réflexion. A partir de là, on peut imaginer faire évoluer les postures des maîtres d’ouvrage et des décideurs.