Raoul Girand

Itinéraire

Je n’ai pas une approche théorique ou conceptuelle de la concertation. Ma réflexion est issue de la pratique. Avant de commencer ma formation initiale de technicien en élevage, j’ai travaillé deux ans en tant qu’ouvrier agricole. Etant né en banlieue parisienne, j’ai dû apprendre à vivre avec des gens très éloignés de mon milieu familial. Cela a été mon premier apprentissage de l’écoute et de la compréhension de l’autre. Puis, une fois diplômé, j’ai travaillé dans une association qui organisait des échanges entre agriculteurs, élus locaux et autres acteurs du monde rural. On ne parlait alors pas de concertation mais d’ « approche territoriale ». L’esprit était cependant le même : faire le choix du dialogue plutôt que de l’affrontement autour d’enjeux communs, sans cependant occulter la question des rapports de force.
Puis je suis entré à l’Ifrée, une association d’éducation à l’environnement. La question de la participation accompagne depuis toujours les pratiques dans ce domaine. Nous l’abordions par exemple, de façon assez empirique, au travers d’Agendas 21. Mais c’est en réalisant d’une étude sur la gestion concertée des ressources en eau que nous avons pris la mesure de nos besoins de méthode sur le sujet. Nous avions déjà rencontré des professionnels de la concertation, nous leur avons alors demandé de nous former et de nous accompagner dans nos missions. Puis nous avons développé nos pratiques, principalement en accompagnant des collectivités territoriales. Enfin, depuis quelques années, nous sommes devenus nous-mêmes formateurs.

Message

Je m’interroge sur la part, trop souvent prépondérante, donnée à l’animation dans les discussions sur les méthodes. Une démarche n’est pas participative parce que les techniques d’animation sont contributives, créatives ou ludiques ! Elle l’est si le sujet comporte .des enjeux réels pour les participants, si les marges de manœuvre sont consistantes, si le public est diversifié et non pas seulement constitué de gens qui sont d’accord entre eux, si tout cela fait effectivement évoluer la décision Bien sûr, les méthodes et outils sont indispensables pour faciliter l’expression des individus. Il est nécessaire de bien les choisir et de savoir les maîtriser. Mais il ne faut pas juger du caractère participatif d’une démarche seulement à partir des outils d’animation. A ne regarder que la forme, on s’éloigne de l’intention. Souvent par exemple, on cherche à rendre les réunions plus « participatives » : c’est très bien, mais il faut également se demander quels changements le processus provoquera dans les rapports de pouvoir entre acteurs. La question centrale de la participation, c’est celle du pouvoir de décision.