Les parcours
Cette page est issue d’une extraction du site Comédie.
Vous trouverez ici une série de questions qui sont organisées en plusieurs parcours :
Il n’y a pas de définition unanime de la concertation. Ce terme recouvre des pratiques parfois très diverses. Vous trouverez ici :
Notre vision de la concertation
« La concertation est un processus d’échange entre plusieurs personnes ou organismes porteurs d’intérêts différents qui cherchent à aboutir collectivement à des propositions en vue d’orienter des décisions futures ».
La concertation est un processus d’échange entre plusieurs personnes ou organismes porteurs d’intérêts différents qui cherchent à aboutir collectivement à des propositions en vue d’orienter des décisions futures.
Pour nous, il y a trois éléments importants qui déterminent ce qu’est une concertation : les participants, les échanges et le rapport à la décision.
Les participants
Nous parlons ici de « plusieurs personnes ou organismes porteurs d’intérêts différents ». Pour nous, les participants à la concertation peuvent être des individus parlant en leur nom propre et/ou des représentants de collectifs (associations, collectivités, services de l’Etat, acteurs socio-économiques, citoyens…). L’important est leur diversité de statuts et la diversité des intérêts qu’ils portent par rapport à l’enjeu considéré (par exemple les intérêts relatifs à l’environnement, à l’emploi, aux loisirs, au paysage, etc.). C’est cette diversité de statut et d’intérêt qui fait la richesse des échanges et qui garantit, lorsqu’il s’agit de prendre des décisions relatives à des biens publics, que des absents ne seront pas lésés. La concertation est donc un processus inclusif qui vise à rassembler largement, même si elle peut comporter des moments ouverts à tous et d’autres réservés à des cercles plus restreints. Elle vise également à croiser les regards, sans éluder les divergences, même s’il peut arriver que des participants soient invités à se regrouper par catégories d’acteurs à certains moments, et à se mélanger à d’autres moments. Nous prêtons donc de l’attention à l’identification et à l’invitation des participants, ainsi qu’à la mixité des publics.
Les échanges
Pour nous, l’idéal de la concertation réside dans la co-construction, c’est-à-dire, à partir de visions et d’intérêts différents portés par les participants, d’élaborer progressivement des propositions partagées par le plus grand nombre. L’art de la concertation réside donc dans sa capacité à faire évoluer les participants de l’affrontement ou de la méconnaissance vers la construction progressive d’un accord, sans pour autant occulter les divergences d’intérêts. C’est une démarche qui prend nécessairement du temps, qui peut comporter des phases d’information, de consultation, de créativité et de négociation. C’est un processus d’itération, de tâtonnement et d’apprentissage. Il ne faut cependant pas considérer cet objectif comme un absolu. D’une part, la recherche d’accord est souvent un objectif réaliste mais il ne faut pas que cela se fasse au prix d’une renonciation de certains à ce qui constitue leurs intérêts majeurs. Dans ce cas, s’il s’avère impossible de trouver des solutions acceptables par tous, il est préférable de constater des divergences et la difficulté de les dépasser. D’autre part, la recherche d’accord n’est pas nécessairement ce qui est recherché par les acteurs concernés (et cela peut s’entendre) ni un but réaliste dans certaines situations. La difficulté est d’en juger sans avoir essayé…
Le rapport à la décision
L’objectif de la concertation est de nourrir la décision, publique ou privée, afin de faire en sorte que cette décision soit plus appropriée, plus légitime, mieux comprise ou mieux mise en oeuvre. Une concertation sans lien à la décision n’est pas une concertation mais plutôt un débat d’idées. Pour autant, la concertation n’est pas la co-décision : elle aboutit à des propositions qui doivent inspirer les décideurs sans pour autant leur ôter le pouvoir et la responsabilité que leur donne le cadre législatif en vigueur. Cet équilibre est délicat. D’un côté, les participants souhaitent que leurs échanges aient une influence sensible sur la décision. De l’autre côté, les décideurs souhaitent garder leur liberté de décision. De notre point de vue, il n’y a pas de réponse unique à cette question qui prend des formes différentes selon le contexte et selon le sujet en question. Il ne faut sans doute pas lui donner de réponse de principe ou de portée générale, mais constater empiriquement comment les acteurs y ont répondu dans une situation donnée et évaluer si cela les satisfait ou non. Quoi qu’il en soit, cette question du pouvoir de décision est une dimension qui ne doit pas être négligée car beaucoup de participants fondent sur elle leur jugement sur l’effectivité de la concertation. Il importe au minimum que dans une situation donnée, il n’y ait pas de malentendu entre les participants sur la portée de la concertation sur la décision.
Des définitions tirées d’autres sources
- Wikipédia : concertation
- Le Dictionnaire critique de la participation : concertation ; démarche de concertation
- Dictionnaire Larousse : se concerter
- Commission nationale du débat public : concertation
Les différences avec des termes proches
Information, consultation, débat, débat public, médiation, négociation, dialogue territorial : quelles différences ?
De quelles concertations parle-t-on ici ?
Ce site est consacré plus spécifiquement aux démarches locales de dialogue engagées de façon volontaire par les acteurs du territoire afin de répondre à des enjeux de partage de l’espace, de gestion des ressources naturelles, de régulation des conflits d’usage.
Pour aller plus loin
Articles :
- Mieux définir la concertation, du pourquoi au comment. Jean-Eudes Beuret, Revue Négociations, 2012. « Nous allons nous intéresser à ce que recouvre réellement la concertation […] pour poser une définition susceptible de servir la créativité des parties prenantes. Lire l’article
- La concertation : un terme flottant pour un domaine mouvant ? Laurent Mermet, Revue Négociations, 2006. « Le terme de concertation nous incite à une discussion sans fin : parcourons, labourons, retournons le champ de la concertation sans nous lasser ! » […] Lire l’article
Auteur – Pierre-Yves Guihéneuf
Pourquoi fait-on appel à la concertation ? Il peut y avoir différentes raisons à cela.
prendre de meilleures décisions
La confrontation des points de vue, c’est le moyen d’aboutir à des décisions plus efficaces. L’écoute et le débat contradictoire enrichissent la réflexion et limitent les risques de se tromper.
Olivier Sybony (vidéo) montre comment, à plusieurs, éviter les biais cognitifs et prendre de meilleures décisions. Christian Morel (note de lecture) énonce des règles pour une délibération de qualité menant à des décisions fiables.
Des expériences comme celle de la concertation sur le bassin versant Brévenne Turdine montrent comment ces principes s’incarnent sur le terrain et comment le dialogue peut aboutir à un projet plus efficace que ce qui était prévu au départ.
mobiliser les savoirs locaux
La participation du public et des parties prenantes permet de faire émerger des savoirs sur le territoire et de les valoriser dans des projets ou des politiques publiques.
Dans le Pays du Mont Blanc, la mobilisation des habitants vise à dresser un état des lieux du territoire. De nombreux organismes mobilisent la population pour inventorier par exemple les zones humides, les arbres ou plus largement la biodiversité.
gérer les conflits, favoriser les synergies
Gérer ou prévenir les conflits entre acteurs du territoire à propos de projets à venir ou des sujets de dissensions existants est un objectif de nombreuses concertations.
De nombreuses expériences montrent comment la concertation a permis de gérer des conflits et de déboucher sur des projets : aménagement d’une plage, utilisation partagée des alpages, dégâts dus à la faune, comme le castor, la loutre ou le sanglier, utilisation concertée de falaises, etc.
anticiper les difficultés
Ouvrir précocement des espaces de dialogue, c’est donner à la population la possibilité de formuler des objections qui peuvent être fondées. Les ignorer pourrait se traduire ultérieurement par des réactions d’opposition, voire des échecs. Il est préférable de faire émerger les critiques, d’y rechercher des réponses ou de se préparer à assumer ses choix.
Des élus de Bretagne montrent ainsi, à propos de projets urbains, que la concertation donne l’assurance « de ne pas trop se tromper ».
faciliter l’appropriation de l’environnement, mobiliser des relais
Miser sur la vertu pédagogique de la concertation, cela permet de trouver des alliés dans la population, qui comprendront mieux les raisons des choix effectués et contribueront à les expliquer.
Gestionnaire de la Réserve naturelle des Partias, dans les Hautes Alpes, la LPO résout des conflits d’usage par le dialogue, puis décide même d’élaborer l’ensemble du Plan de gestion avec les acteurs du territoire car elle souhaite que son action soit mieux comprise et que les habitants participent à la mise en oeuvre des actions.
démocratiser, responsabiliser, donner envie d’agir
Pour un élu, faire partager sa vision en engageant un dialogue avec la population autour d’enjeux concrets, cela participe de sa mission. Pour un citoyen, apporter sa contribution aux choix collectifs, cela renforce le sentiment de citoyenneté. La concertation, c’est l’occasion de réfléchir ensemble sur ce qu’il est possible de faire, de passer de l’opposition à la co-construction et d’en finir avec les « y a qu’à… ».
Dans le Haut-Ségala, les élus ont souhaité associer les citoyens à un projet de développement de l’éolien. A Villeveyrac, ils engagent une démarche d’Agenda 21. Près d’Annecy, une association veut donner aux citoyens envie d’agir sur les questions agricoles.
créer des espaces locaux de dialogue
Où discute-t-on ensemble aujourd’hui des enjeux de la vie en société ? Susciter des espaces de dialogue, cela peut contribuer à créer des liens entre les personnes, à renforcer le sentiment d’appartenance au territoire, à prévenir les incompréhensions.
Les attendus de la concertation diffèrent selon les personnes. Habituellement, les élus ont certaines attentes, les habitants en ont d’autres, les techniciens encore d’autres et à l’intérieur de chacun de ces groupes, les attentes peuvent être différentes. Il n’est pas indispensable que ces attentes soient les mêmes pour que la concertation soit productive. En revanche, il est utile de bien comprendre et de respecter les attentes de chacun.
Regardez les déclarations d’élus et d’habitants dans le film « la concertation » (8 mn). Notez leurs propos et en particulier ce que la concertation a apporté à chacun.
Regardez et lisez les entretiens que nous avons réalisés avec trois élus impliqués dans des démarches de dialogue territorial et qui expliquent ce que la concertation leur a apporté : Annick Cressens, Josette Leroy et Paul Perras.
Pour aller plus loin
Qu’apportent les dynamiques de dialogue aux territoires… et aux acteurs qui y participent?
Entretien filmé avec Jean-Eudes Beuret, maître de conférences à Agrocampus Ouest.
Auteur : Philippe BARRET Geyser
Les critiques à la concertation existent. Quelques-unes, peu fondées, relèvent de méconnaissances qu’il est facile de dissiper. En revanche, d’autres sont pertinentes et méritent qu’on y prête attention. Il est inutile de les nier ou de les minorer, mais préférable d’y apporter des réponses par une méthode appropriée.
Nous avons identifié un certain nombre de critiques fréquentes et les avons regroupées en trois catégories. Nous vous proposons quelques éléments de réponse, à vous de vous saisir de ceux qui vous paraissent les plus pertinents.
N’oubliez pas que derrière une critique, peuvent se cacher des craintes ou des besoins non satisfaits. Identifier ceux-ci en laissant parler votre interlocuteur est souvent préférable au fait de lui asséner trop vite un argument.
Les critiques sur le principe
Dans une démocratie représentative, ce sont les élus qui doivent décider
Cette question appelle plusieurs réponses possibles.
1. D’un point de vue formel, l’affirmation est exacte. En démocratie, les élus et les représentants de l’Etat ont le monopole des décisions publiques. Cela se justifie car ils tirent leur légitimité du suffrage universel (ou de délégations de pouvoir dans le cas des agents de la fonction publique). Ils sont également responsables des décisions prises. D’ailleurs, la concertation ne remet pas ce principe en question car aujourd’hui, la très grande majorité des processus participatifs ne sont pas décisionnels. Lorsqu’ils le sont (cas de certains budgets participatifs, par exemple), c’est parce qu’il y a eu une délégation de pouvoir faite dans les règles. Dans les autres cas, la concertation ne vise pas à décider à la place des élus mais à contribuer à leur décision. Ceux-ci restent maîtres de l’arbitrage final.
2. Cependant, la concertation répond à des attentes. Si la concertation est inscrite dans la loi depuis les années 1990 dans de nombreux domaines, c’est qu’il y a des raisons. Le recours à la concertation s’explique par plusieurs facteurs :
– elle répond à de multiples attentes sociales, provenant de différents acteurs (pas seulement les citoyens), qui souhaitent des décisions plus démocratiques, ou plus justes, ou encore plus efficaces… Pour un aperçu de ces attentes voir : la concertation, à quoi ça sert ?
– elle est motivée par une crise de confiance des citoyens envers les élus et envers les experts. Qu’on la considère comme justifiée ou non, c’est une réalité qui s’impose. Les processus participatifs visent aussi à redonner de la légitimité aux décisions prises en associant les citoyens aux difficultés de la décision publique. Voir note de lecture : Le nouvel esprit de la démocratie
– en matière d’environnement, la décision publique ne fait pas tout. Il faut coordonner des acteurs publics et privés (par exemple les agriculteurs, les associations, les professionnels du tourisme, les entreprises…), ces derniers sont souvent maîtres des décisions qu’ils prennent. La contrainte envers eux (par la loi) n’est pas toujours possible ni efficace. Il est préférable de dialoguer afin de coordonner les décisions publiques et privées pour l’intérêt de tous. Voir note de lecture : Environnement, décider autrement.
3. Cette objection renvoie à la légitimité de la prise de décision. La question de la légitimité est fort… légitime, mais on peut aussi poser celle de l’efficacité. Or, l’expérience montre que dans la plupart des cas, les décisions élaborées collectivement, au terme de débats contradictoires, sont plus efficaces car les débats permettent de mettre en avant des dimensions qui, sans cela, n’auraient pas été prises en compte ou auraient été sous-estimées. Autrement dit, si les élus sont légitimes pour décider, ils ne sont pas omniscients. S’entourer d’avis d’experts est évidemment indispensable mais cela ne suffit pas toujours car les parties prenantes et les habitants ont également des connaissances spécifiques qu’il est utile de mobiliser. Cette perspective utilitariste de la concertation est développée par Christian Morel dans son livre Les décisions absurdes . Il montre que chacun est soumis à des biais dans sa façon de penser et que le fait de débattre des décisions permet de limiter le risque de faire de mauvais choix. Même si au terme de ce processus de débat, c’est bien aux élus d’établir l’arbitrage final.
4. Cette position de principe peut cacher d’autres craintes. Identifier ces craintes par l’écoute active est souvent possible. Par exemple, certains élus craignent que le fait de réunir les acteurs aux positions divergentes ne suscite des conflits, d’autres que cela ne ralentisse un projet. Dans ce cas, c’est à ces craintes qu’il faut répondre.
La concertation, c’est un marchandage entre des groupes d’intérêts, les plus forts peuvent s’imposer et l’intérêt général est alors perdu de vue
Cette objection est très pertinente.
La création de groupes locaux d’acteurs agissant comme des lobbies et s’appropriant le droit de gérer ou édicter des règles concernant des biens communs en excluant les intérêts d’autres parties constitue une sorte de confiscation et représente un risque. En outre, le poids de certains de ces acteurs au sein des espaces de dialogue, s’il n’est pas tempéré, peut conduire à des accords qui leur soient démesurément favorables.
Une réponse méthodologique
Il y a plusieurs façons de prévenir ces risques :
1. Assurer la transparence du processus de concertation : organiser des réunions publiques, diffuser toute l’information qui y est produite, rendre compte des décisions, etc…
2. Rester inclusif : prévoir des moments ouverts à tous (même si des ateliers sont également organisés avec un plus petit nombre de participants), informer la presse locale de l’organisation de la concertation (durée, objectif, modalités), ne pas exclure d’office certains participants y compris ceux qui sont peu coopératifs, prévoir différents modes de participation notamment en ligne…
3. Veiller à que soient représentée une diversité d’intérêts, même si cela rend plus difficile le dialogue… Pour cela, ne pas hésiter à faire un travail préparatoire d’identification des acteurs concernés et notamment des usagers concernés.
4. Veiller à la présence d’acteurs soucieux de l’intérêt général : des représentants de l’Etat, des élus, de simples citoyens, un garant extérieur…
5. Pour gérer les inégalités dans les rapports de force, créer un cadre et le faire valider par les participants, assurer en particulier le respect et l’écoute de chacun, la transparence des documents produits, etc.
6. Dans le même objectif, bien faire valider le rôle de l’animateur et notamment sa neutralité (ou son impartialité) lors des débats. Il est possible par exemple, lors d’entretiens individuels préalables aux réunions, de bien expliquer à chacun que le rôle de l’animateur consistera à ce que chacun puisse participer et être écouté, quelle que soit sa représentativité ou son statut.
7. Rester conscient que si les rapports de force sont manifestement trop déséquilibrés, il est préférable de ne pas se lancer dans ce qui pourrait devenir un simulacre de concertation. Cependant, il est complexe de juger a priori des rapports de force et ceux-ci ne s’apprécient en aucune façon par le statut ou la représentativité des protagonistes, mais plutôt par les pouvoirs qu’ils détiennent : pouvoir de décision, pouvoir de mobiliser la population, expertise, connaissance du terrain, écho dans les médias, créativité…
Une réponse politique
Cette question peut aussi prendre un tour plus politique et renvoyer la formation de l’intérêt général. Traditionnellement, en France, on considère qu’il existe un intérêt supérieur à celui des individus et qui est énoncé par la puissance publique (l’Etat ou les élus locaux). Cette idée a été formalisée par Jean-Jacques Rousseau en 1762 dans son ouvrage « Du contrat social ».
Or, aujourd’hui, cette légitimité des acteurs publics à énoncer l’intérêt général est contestée et une multitude d’acteurs se sentent légitimes pour le faire. La crise de confiance entre élus et société est à l’origine de ce changement, ainsi que le retrait de l’Etat et l’affaiblissement de ses moyens.
Pour certains, l’intérêt général se construit désormais grâce à une délibération entre des acteurs divers, dont les représentants de l’action publique. C’est l’idée de « démocratie délibérative » qui permet de repenser la construction de l’intérêt général : la légitimité d’une décision repose sur la manière dont la décision a été prise, et non plus sur celui qui l’a prise. Plusieurs principes font la qualité de cette délibération : son caractère inclusif (elle n’exclut personne), l’égalité entre les personnes (les propos ont la même importance, quelle que soit le statut ou la représentativité de celui qui les énonce) et la transparence. Le philosophe Jurgen Habermas a notamment contribué à développé cette idée (voir l’article de Dicopart sur la démocratie délibérative ou sur la qualité de la délibération).
Tout ne peut pas se décider sous forme de concertation
Effectivement… La multiplication des concertations et l’empilement des dispositifs participatifs peut d’ailleurs conduire à des effets de saturation de la part des participants. Il y a nombre de domaines dans lesquels la délégation fonctionne parfaitement et il ne s’agit pas de mettre de la concertation partout.
Cependant, la concertation peut s’avérer utile dans certains cas. Nous vous invitons à consulter quelques unes des motivations évoquées ici : la concertation, à quoi ça sert ?
L’une des difficultés de la concertation est de mesurer en quoi elle peut apporter une plus-value, tout en veillant à ne pas la juger à sa seule utilité immédiate. Car la concertation et la participation produisent du lien social, de la compétence individuelle et collective, de l’innovation…
On parle de concertation alors que les décisions sont déjà prises
Engager une concertation si toutes les décisions sont déjà prises est inacceptable. Il arrive parfois que les décisions ne soient pas formellement prises (par exemple, le vote d’une assemblée locale n’a pas eu lieu) mais que la conviction des décideurs soit déjà faite. Pour éviter cela, il est nécessaire :
1. que la concertation ait lieu suffisamment en amont de la décision, lorsque l’opportunité d’un projet n’est pas encore certaine ou au moins lorsque des options structurantes sont encore en débat.
2. que les marges de manoeuvre soient clairement identifiées dès le début et présentées aux participants: Qu’est-ce qui est négociable et qu’est-ce qui ne l’est pas ? Quels sont les délais pour aboutir ? Qui décidera finalement ? etc.
3. que l’animateur de la concertation rappelle aux décideurs que la concertation leur donne des droits et des devoirs :
devoir de se laisser influencer, c’est-à-dire de ne pas arriver avec des idées toutes faites.
droit de décider des arbitrages finaux ;
devoir d’en rendre compte de façon argumentée
Les critiques sur la méthode
Cette difficulté est récurrente dans certains processus de concertation. Elle est plus fréquente quand l’enjeu apparaît lointain ou peu important à une grande partie de la population. Souvent, ce sont les «habitués» de la participation qui se mobilisent : responsables associatifs, personnes engagées dans la vie politique, retraités…
Comment y répondre ?
Cette difficulté est récurrente dans certains processus de concertation. Elle est plus fréquente quand l’enjeu apparaît lointain ou peu important à une grande partie de la population. Souvent, ce sont les «habitués» de la participation qui se mobilisent : responsables associatifs, personnes engagées dans la vie politique, retraités…
Comment y répondre ?
- Certains estiment que si la participation est faible, c’est avant tout parce que le processus de mobilisation est insuffisant. Il faut alors « aller chercher » les habitants,
– soit en faisant des efforts de communication
– soit en recourant au tirage au sort qui est une façon efficace de mobiliser un panel de non-habitués de la concertation et d’avoir un public diversifié. C’est le cas par exemple dans les conférences de citoyens. - D’autres considèrent que si la participation est faible, c’est parce que l’enjeu est jugé secondaire par les participants. Il faudrait alors partir de leurs préoccupations plutôt que de leur imposer des sujets qui ne les préoccupent pas vraiment…
- D’autres jugent que si la participation est faible, c’est parce que les participants estiment que leur influence sur la décision sera minime, voire nulle. Il faut alors veiller à assurer une «traçabilité» des idées émises et de leur devenir ou rendre compte des décisions prises et de la façon dont elles ont été modifiées par la concertation. Ces mesures ont des effets à long terme seulement (sur les concertations suivantes). Il est aussi possible de donner le pouvoir de décision aux participants, comme cela se fait par exemple lors des référendums décisionnels ou lors de budgets participatifs décisionnels.
- Enfin, certains pensent que cette question n’est pas importante, soit parce qu’ils considèrent que l’objectif pour les élus est d’ouvrir aux habitants une porte vers plus de démocratie, mais que ces derniers peuvent ou non franchir en fonction de leurs besoins ; soit parce qu’ils pensent que le but de la concertation n’est pas de mobiliser largement mais de mobiliser les acteurs qui se sentent concernés ou ceux dont on a besoin pour faire avancer les projets…
Si le processus de concertation n’est pas jugé légitime par les participants, il y a tout lieu de penser que son résultat sera également dénué de crédit. A cette critique « procédurale », qui est souvent le fait d’habitants ou d’associations, on peut apporter plusieurs réponses :
– organiser une première étape consistant en se mettre d’accord avec eux sur les modalités de concertation (par exemple avec un Comité de pilotage de la concertation associant des participants volontaires). On peut pour cela faire une proposition méthodologique et la soumettre à discussion. Sujets, durée, participants, nombre et format des réunions, documents d’information, modalités de communication, pilotage de la concertation, comptes-rendus… tout peut être discuté et amendé. Une réunion de travail peut suffire mais le consensus doit être recherché et l’accord formalisé dans un document que l’on peut appeler par exemple « Charte de la concertation de… ». Vous trouverez ici un exemple de « charte spécifique » co-élaborée pour un grand projet : Concertation Port Seine-Métropole Ouest.
– demander à un garant de superviser l’ensemble du dispositif et si possible de participer à son élaboration. Cette solution n’est pas opposée à la précédente mais plutôt complémentaire : si les participants ont co-élaboré une charte ou simplement co-construit ensemble le dispositif de concertation, le garant s’appuiera sur cette base et veillera à ce que ces modalités soient respectées, dans la lettre et dans l’esprit. Le garant peut être choisi de façon collective (par un Comité de pilotage de la concertation par exemple), ce qui aidera à consolider sa légitimité. Si la concertation est réglementaire, il peut être nécessaire de passer par la liste nationale des garants gérée par la Commission nationale du débat public (CNDP).
Concertation = manipulation ? Cette critique est parfois portée par des citoyens ou des associations déçus par des processus de concertation qui n’ont pas produit d’effet à leurs yeux. Elle renvoie à deux questions distinctes :
- la question du lien à la décision
Une concertation qui n’aurait aucun effet sur la décision est évidemment suspecte. Parfois, les effets sont jugés insuffisants (ce qui peut être une question d’appréciation…). Pour aborder cette question délicate, le praticien doit veiller en premier lieu à ne pas se lancer dans des concertations « cosmétiques », c’est-à-dire des processus de dialogue dans lesquels les marges de manoeuvre sont quasiment inexistantes et les décisions quasiment prises avant même le début de la concertation. Pour cela, une phase préparatoire à la concertation est indispensable, durant laquelle les marges de manoeuvre seront identifiée, voire améliorées si c’est possible grâce à une négociation avec les décideurs.
En second lieu, le praticien doit veiller à ce que, avant même de commencer, les initiateurs de la concertation s’engagent à rendre compte précisément et de façon argumentée de ce qu’ils feront des idées recueillies lors de la concertation et feront un retour d’information aux participants.
- la question de la « loyauté » du processus
En matière de concertation, il existe des règles minimales : être transparent, donner toute l’information disponible, respecter les participants, écouter chacun, etc. La sincérité est indispensable : ceux qui « font semblant » sont vite démasqués par des participants de plus en plus avertis et méfiants. Il existe aussi des moyens de renforcer la confiance dans le processus de concertation sans pour autant chercher à occulter les différences de points de vue sur le fond : élaborer une charte de la concertation, créer un comité de suivi de la concertation, nommer un garant…
La question de la neutralité de l’animateur appelle une certaine attention. Celui-ci peut disposer d’une confiance limitée au début de la concertation s’il est par exemple salarié d’un des organismes partie prenante. Dans ce cas, c’est par son attitude qu’il gagnera progressivement en crédibilité. Voir : Suis-je légitime pour animer la concertation ?
Les critiques sur les coûts et les risques
Cette remarque est souvent révélatrice d’une confusion entre les processus de concertation et certaines démarches de consultation.
Quand on consulte le public au travers d’enquêtes, de sondages ou d’évènements ponctuels comme des réunions publiques, il arrive fréquemment que de nombreux avis soient formulés, parfois contradictoires, parfois éloignés du sujet, parfois peu étayés ou argumentés.
L’un des objectifs de la concertation est précisément de faire progresser la réflexion, de confronter les avis, de les nourrir d’apports d’experts ou d’autres éléments d’information, de rechercher des points d’accord, de construire des compromis réalistes. Il faut pour cela s’engager, non pas dans des consultations ponctuelles mais dans des processus de travail organisés.
Pour éviter de susciter de faux espoirs, il faut que le cadre de la concertation soit clair, les marges de manoeuvre explicites, les règles validées. Un processus bien préparé relève d’un « contrat » entre ses initiateurs et les participants qui n’a pas de raison d’être équivoque. Ce sont souvent la confusion et les fausses promesses qui créent de faux espoirs.
Pour ce qui est des conflits, il faut mesurer le risque en fonction des particularités de la situation locale et des antécédents. Il peut arriver que des espaces de concertation soient gagnés par des conflits existants sur le territoire, portant sur d’autres sujets et qui ne trouvent pas de lieux d’expression, ou par des conflits passés qui ne sont pas entièrement soldés. Dans ce cas, la concertation risque d’être instrumentalisée par des enjeux extérieurs et peut s’avérer frustrante pour les participants.
Hormis ces cas particuliers, il ne faut pas craindre les divergences d’opinion (qui contribuent à la richesse des échanges) ni la passion avec laquelle certains participants les font valoir (qui est souvent un indicateur utile de l’importance qu’elles ont pour eux). C’est aux animateurs de créer un cadre suffisamment sécurisant (des règles, un sujet, des étapes, un mode de décision explicite…) pour que les divergences s’expriment sans générer (trop) de violence ni bloquer le débat. Dans certaines situations particulièrement tendues, l’aide de tiers extérieurs (médiateurs, garants) peut faciliter les choses en permettant aux participants de prendre du recul par rapport aux propos ou aux attitudes et en faisant progresser le débat.
Il est certain que pour qu’une concertation soit productive, il faut y consacrer un minimum de temps et de moyens. Il est certain qu’il faut également de la méthode. Sans un cadre clair et sans un processus balisé, une concertation peut se transformer en chambre de doléances, provoquer des conflits au sein de la population et de faux espoirs, générer frustrations et désillusions. Au contraire, quand elle constitue un processus de travail efficace, quand le cadre est rassurant, quand les objectifs sont clairs, elle fait évoluer les points de vue sans occulter les inévitables divergences et elle donne lieu à des projets mieux affermis, mieux acceptés et mieux mis en oeuvre. C’est à ce moment que les bénéfices apparaissent : de nouvelles idées et des projets améliorés, une meilleure compréhension des décisions prises, plus de lien social, des processus d’apprentissages fructueux.
A chacun de mesurer les coûts et les bénéfices…
Voir aussi « Une dépense pour quoi ? » dans notre clip « Le dialogue territorial en 3 questions«
Pour que la concertation soit efficace, certaines conditions doivent être réunies. C’est particulièrement le cas dans les démarches volontaires c’est-à-dire non imposées par la réglementation. Voici les principales de ces conditions :
- Les parties les plus importantes sont prêtes à s’engager dans le dialogue ; en particulier, les décideurs y voient un intérêt.
- L’enjeu de la concertation est réel, c’est-à-dire qu’il y a des marge de manœuvre et les décisions ne sont pas prises
- Le rapport de force est à peu près équilibré
- Le délai disponible est suffisant pour établir les échanges et progresser vers un accord
- Il existe un minimum de moyens : budget, compétences…
- Les modalités sont acceptées par tous : objet du dialogue, calendrier, participants, animateur, règles, etc.
Comment s’assurer que ces conditions sont réunies ? Nous suggérons de réaliser un «diagnostic initial», aussi appelé «étude de contexte». Il s’agit pour l’initiateur ou l’animateur de la concertation de réunir des informations auprès de quelques personnes pour avoir une meilleure compréhension de la situation et élaborer ensuite un dispositif de concertation pertinent.
Cette étude, plus ou moins détaillée selon la situation, est basée sur des entretiens avec les acteurs du territoire ainsi que sur la lecture de documents. Elle porte sur :
- les acteurs, leurs formes d’organisation et leurs attentes. Il est possible de réaliser des cartes d’acteurs qui synthétisent cette partie de l’étude
- l’histoire locale et les enjeux
- le processus décisionnel
Les entretiens bilatéraux avec les principales parties en présence sont importants. Ils permettent de présenter le projet de concertation aux futurs participants, de s’assurer de leur accord de principe, de négocier les modalités avec eux. Ces entretiens alimentent l’étude de contexte car ils donnent à l’animateur des informations utiles sur la situation et les enjeux. Mais ils ont également d’autres objectifs :
- préparer les protagonistes à leur participation future en leur annonçant les règles et l’esprit de la concertation, en présentant les participants et les modalités envisagées, etc.
- concevoir le dispositif de concertation avec eux ou de les consulter sur le dispositif de concertation prévu, de façon à ajuster celui-ci en fonction de leurs besoins
Pourquoi mobiliser ?
Mobiliser activement les participants à un processus de concertation répond à divers objectifs. En premier lieu, cela permet de s’assurer que tous les intérêts en présence soient bien représentés et que le maximum de compétences soit mobilisé, ces deux facteurs contribuant à la qualité du résultat. En outre, cela permet d’éviter que certains acteurs ne soient « oubliés » et cela renforce le caractère démocratique du processus de dialogue, ces deux facteurs contribuant à la légitimité de la concertation.
Il ne faut donc pas craindre de mobiliser des intérêt antagoniques, bien au contraire, ni de mobiliser largement. Les divergences et le nombre contribuent à la richesse des échanges et à la solidité du résultat. Par contre, ils rendent la méthode d’autant plus indispensable et le savoir-faire de l’animateur d’autant plus précieux. Il existe en effet des méthodes et des outils pour gérer les divergences et le grand nombre de participants au cours d’un processus de dialogue. Vous trouverez des éléments sur tout cela dans ce site.
Comment mobiliser ?
Nous vous proposons ici des pistes autour des points suivants.
Le périmètre pertinent
Une des premières questions à se poser est celle du périmètre géographique et social concerné. Parfois, celui-ci est imposé assez naturellement par l’objet du dialogue. Parfois, il faut prendre le temps d’y réfléchir en se demandant qui est concerné…
Le repérage des acteurs
Une des premières tâches est d’identifier les acteurs présents sur le territoire, qu’ils soient organisés ou non. Nous proposons pour cela de commencer par identifier les usages. Un inventaire doit être réalisé, éventuellement une cartographie des acteurs.
Les outils pour mobiliser
Comment inviter les citoyens à participer lorsque ceux-ci ne se manifestent pas spontanément ? Comment dépasser le cercle des convaincus ou aller chercher les publics éloignés ? Ce sont des questions auxquels il n’existe pas de réponses toutes faites. Dans des contextes urbains, regardez ce qui s’est fait à Lodève ou à Reims… Dans des contextes ruraux, consultez les expériences menées dans l’Ain, le Nord ou l’Isère. N’hésitez pas à prendre contact avec les porteurs de projets.
Les niveaux de participation
Trop de monde ? Des degrés de motivation différents ? Il est possible de concevoir un processus de concertation à géométrie variable qui mobilise les acteurs de façon différente.
Auteur : Pierre-Yves Guihéneuf
Le cadre de la concertation : de quoi parle-t-on ?
On désigne par « cadre de la concertation » à la fois la définition du projet, de l’organisation opérationnelle et des règles du dialogue.
Pourquoi un cadre, quels sont les enjeux ?
Le cadre est là pour garantir :
l’identification par chacun des participants des objectifs et de l’objet de la démarche,
la mise en place entre les participants de relations de travail conformes aux principes de la concertation,
la transparence du processus de décision.
Le travail progressif d’élaboration du cadre permet à chacun (commanditaire, parties prenantes et animateur) d’avancer dans la compréhension du sens du dispositif.
C’est l’existence de ce cadre qui va permettre l’investissement, en connaissance de cause, de chacune des parties prenantes.
Moins les parties prenantes ont l’habitude de travailler ensemble, plus les relations existantes sont tendues ou conflictuelles, plus le cadre de la concertation doit être précis et plus l’animateur va s’appuyer dessus pour permettre le travail collectif.
Comment poser le cadre ?
- Recueillir et analyser la demande du commanditaire
Au moyen d’un ou de plusieurs entretiens avec le commanditaire : il s’agit de recueillir ses attentes et ses intentions et de s’assurer qu’elles relèvent bien d’une logique de concertation.
Dans le cas contraire, l’animateur engage avec le commanditaire un dialogue dont le but est de l’aider à clarifier ses intentions et à identifier ce qui peut faire l’objet d’une concertation : il doit s’agir d’une question importante, qui concerne différentes catégories d’acteurs, pour laquelle il existe une marge de manœuvre (tout n’est pas déjà décidé) et pour laquelle on attend que les parties prenantes élaborent ensemble des propositions.
Ces entretiens permettent donc :
de vérifier si la demande du commanditaire relève bien d’une logique de concertation,
d’identifier le thème général et le périmètre géographique de la concertation,
d’identifier les parties prenantes à mobiliser,
de clarifier le processus de décision : qui décidera et dans quel cadre ?
de valider et de contractualiser avec le commanditaire ces 1ers éléments du cadre de la concertation ainsi que la mission qui sera confiée à l’animateur de la concertation.
- Rencontrer les parties prenantes
Cette étape consiste à conduire auprès des parties prenantes des entretiens semi directifs pour recueillir, en complément de ce qui a été exprimé par le commanditaire, les informations nécessaires pour finir de préciser le cadre de la concertation.
Ces entretiens préalables traduisent concrètement l’intention d’associer les parties prenantes à la démarche de concertation. Ils jouent donc un rôle essentiel dans la mobilisation des parties prenantes et dans la légitimité qui sera accordée à la concertation.
Une concertation nécessite de réaliser entre 10 et 20 de ces entretiens préalables en fonction du thème et du périmètre de la concertation. Ils permettront d’aborder plusieurs points.
Ces entretiens permettent à l’animateur de vérifier et de rendre compte au commanditaire qu’une démarche de concertation est possible et à quelles conditions.
- Concevoir, formaliser et faire valider le cadre de travail
Les entretiens préalables donnent lieu à la rédaction d’une synthèse qui sera remise au commanditaire. Cette synthèse rend compte des aspects essentiels de la perception de la situation par les parties prenantes et permet à l’animateur de préciser différents points du cadre de la concertation :
les sujets qui seraient à aborder dans le cadre de la concertation, et en fonction, le nombre et la composition des groupes de concertation à envisager,
les « instances de concertation » à mettre en place,
les modalités de travail à proposer : nombre de réunions à programmer, calendrier et horaires de travail à proposer, conditions préalables à réunir.
Les principales règles de dialogue à instaurer compte tenu de la situation.
C’est donc bien seulement à l’issue de ces entretiens préalables que l’élaboration du cadre de la concertation est achevée.
Avant d’être présenté et mis en œuvre, ce cadre de la concertation doit être validé par une instance de décision, en particulier le nombre, les thèmes et la composition prévisionnelle des groupes de concertation et si nécessaire la mise en place d’une ou plusieurs instances de consultation.
Il est indispensable que les instances de concertation soient composées de personnes du territoire concerné par la concertation et dont l’expérience est en lien avec les sujets à traiter (on entend par expérience : l’histoire, les compétences, le vécu, le domaine d’activité : ce qui en fait des contributeurs légitimes sans risque de démagogie).
- Présenter et mettre en place le cadre de la concertation
Une fois le cadre de la concertation validé par l’instance de décision, il y a principalement deux moments où l’animateur peut le présenter et le mettre en place :
Lors d’une éventuelle réunion publique de présentation et de lancement de la démarche de concertation
Au cours de cette réunion, l’animateur présente les résultats attendus, les sujets, les instances de concertation, la méthode et le calendrier de travail ainsi que les principales règles du dialogue.
Il s’agit de permettre aux personnes présentes de réagir aux sujets proposés, de prendre la mesure de l’investissement qui leur est proposé et ainsi de pouvoir s’inscrire comme participants s’ils le souhaitent.
Lors de la première réunion de travail
Lorsque les personnes seront réunies pour la première fois, l’animateur pourra revenir en détail sur l’objet, les objectifs de travail et les règles du dialogue et les valider avec les participants.
- Adapter, faire évoluer le cadre de travail
Avoir un cadre clair, cela rassure les participants. Il doit être assez solide pour que l’on puisse s’appuyer dessus… Mais il arrive qu’au cours du processus, le cadre soit amené à évoluer : on rajoute une réunion non prévue, on traite des questions nouvelles que l’on n’avait pas anticipées préalablement mais qui s’avèrent liées à l’objet du dialogue… Nous recommandons un cadre à la fois ferme et souple. Nous suggérons aussi que les adaptations du cadre soient discutées avec les participants.
Auteur : Raoul Girand
Un processus de concertation comporte plusieurs éléments qui peuvent varier en fonction des objectifs poursuivis. Il n’y a pas de règle unique à ce sujet. Nous proposons ici quelques points de repère.
Les niveaux de participation
Il existe différents niveaux de participation possibles. Une première étape peut consister à déterminer les publics à associer au dispositif puis à définir les niveaux de participation pour ces différents publics (experts, usagers, partenaires, riverains, habitants…) : souhaite-t-on leur transmettre une information ou recueillir leur avis sur une problématique spécifique ou encore co-construire des solutions voire co-décider avec eux du programme d’actions à mettre en œuvre ?
Au préalable de la conception du dispositif, il s’agit de répondre aux questions suivantes : qui souhaite-t-on associer ? Pour faire quoi ? A quel moment ? En fonction des réponses à ces différentes questions, le pilote pourra proposer une place à donner aux uns et aux autres en fonction de différents degrés de participation.
Il n’est pas toujours possible – ni même souhaitable – de chercher à associer tout le monde à chaque étape du dispositif…
Les instances de concertation
La mise en œuvre d’un dispositif de concertation nécessite la mise en place de plusieurs « instances » :
– une instance de décision : un collectif des décideurs ou un comité de pilotage qui participe le plus souvent aux échanges et qui prendra les décisions à l’issue de la concertation
– une équipe d’animation, constituée des animateurs et du « pilote » issu de l’organisme commanditaire, qui prend en charge l’organisation concrète du déroulement ;
– éventuellement, une instance de régulation : un comité de suivi de la concertation composé de l’équipe d’animation et de quelques volontaires parmi les participants, qui s’assure que tout se déroule correctement ;
– éventuellement, un ou des garants et un ou des évaluateurs.
Le pilote du dispositif veille à la définition puis au respect de la composition, du mandat, des modalités de travail et notamment de décision, du calendrier et de l’animation ou du pilotage de chacune de ces instances. Il sera également garant de l’articulation entre ces différentes instances et notamment de la circulation de l’information entre elles, à chaque étape du dispositif.
Les étapes de la concertation
Une fois le cadre général de la concertation défini, le processus de concertation – en tant que tel – va s’organiser en plusieurs étapes. Par exemple :
– la mobilisation des parties prenantes : identification des acteurs concernés et rencontre avec une partie d’entre eux (entretiens préalables) pour vérifier la faisabilité de la démarche de concertation et identifier les principales préoccupations et attentes des acteurs locaux concernés.
Voir la vidéo Gestion partagée du site de Kério qui parle de la réalisation d’entretiens préalables pour recueillir les différentes visions quant aux modes de gestion d’un site naturel des Côtes d’Armor.
– l’information initiale : mise en place d’une réunion publique, avec l’ensemble des acteurs identifiés pour participer au processus de concertation, pour présenter la démarche et s’assurer de la participation aux groupes de concertation envisagés.
– le dialogue : animation des groupes de concertation (ateliers ou autres dispositifs). Les acteurs concernés co-construisent le diagnostic, les orientations et le plan d’actions.
– la finalisation du dispositif : rédaction d’un accord, retour sur la démarche de concertation auprès du comité de pilotage et présentation des résultats obtenus.
A l’issue du dispositif, il importe de communiquer aux participants les décisions prises par l’instance de décision, en expliquant les raisons des choix. Le processus de prise de décision doit être transparent.
Un dispositif de concertation peut faire l’objet d’une évaluation. Elle doit être pensée au démarrage du dispositif et animée durant sa mise en œuvre. Les résultats seront ensuite diffusés à l’ensemble des instances.
La prochaine étape sera la mise en œuvre et le suivi des actions.
Les outils de la concertation
De nombreux outils sont disponibles à différents niveaux : démarches globales de concertation (débat public, conférence de citoyens, dialogue territorial…), modes d’animation de réunions (forum ouvert, world café, etc.), outils d’expression ou de synthèse (métaplan, débat mouvant, color-vote, etc .). Il existe également des outils spécifiques destinés à simuler des situations et tester des stratégies, par exemple grâce au théâtre forum ou aux jeux de rôles.
Auteur‧rices : Raoul GIRAND et Cécile MALFRAY
Affronter les désaccords de façon constructive
Médiation et négociation ont un but en commun : trouver un accord entre des participants qui n’ont pas les mêmes intérêts ou les mêmes visions des choses, grâce au dialogue entre les parties concernées, soit avec l’aide d’un tiers extérieur et neutre (médiation) soit sans lui (négociation).
Les désaccords sont fréquents dans les processus de concertation. Le plus souvent, les échanges se font sur le mode de l’argumentation : chacun cherche à convaincre l’autre, par exemple en évoquant des principes supérieurs, en apportant des données, en élaborant des démonstrations… Avoir recours à la médiation ou à la négociation suppose :
de renoncer à imposer son point de vue ou essayer de faire changer l’autre
de l’écouter avec attention pour le comprendre ; en échange tenter de bien se faire comprendre
de respecter autant que possible ses attentes ; en échange demander à ce que toutes les attentes soient respectées dans la même mesure
de rechercher ensemble une solution mutuellement satisfaisante.
En parlant de négociation, nous nous référons ici à la négociation raisonnée (ou négociation intégrative), dont le but est de déboucher sur des accords justes et équilibrés du point de vue des parties impliquées. De ce point de vue, la négociation n’est pas un marchandage ni un moyen de tromper l’autre ! Voir ci-contre « Pour aller plus loin »
Les principes
Dans un désaccord, il y a un problème et des personnes
Un désaccord, c’est à la fois un problème (par exemple, des intérêts apparemment incompatibles, comme on le voit dans les conflits d’usage) et des personnes qui ne souhaitent pas toujours coopérer, voire même dont chacune considère que c’est l’autre qui constitue le problème… Le premier principe consiste donc, dans une démarche de médiation ou de négociation, à commencer par s’apprivoiser, se (re)connaître et se respecter, avant de s’attaquer à la résolution du problème. Pour cela, on peut par exemple développer des activités préalables : co-construire un diagnostic du problème sans se préoccuper dans un premier temps de savoir qui a raison et qui a tort, se former ensemble, etc… Sans oublier de prendre le temps de s’écouter et de se respecter. Il faut d’abord bien étudier le problème, comprendre les personnes sans a priori et sans jugement, ne pas chercher trop vite des solutions. Dans les conflits à forte charge émotionnelle, cette phase peut prendre du temps et le recours à un médiateur peut être utile.
Distinguer les revendications et les besoins
Les revendications (je veux ceci, je ne veux pas cela..) cachent en général des besoins plus profonds, qui sont de l’ordre de l’intérêt (développer son activité, préserver son patrimoine, garder des marges de liberté…), de la crainte (des contraintes futures, un processus qu’on ne maîtrisera pas, un risque professionnel…) ou encore des valeurs (une certaine vision du territoire, l’idée que seuls certains acteurs sont légitimes à en décider l’avenir…). Ces intérêts, craintes et valeurs ne sont pas toujours exprimées spontanément et lorsque c’est le cas, parfois disqualifiées. Elles peuvent être vues par exemple comme des intérêts personnels, des peurs infondées, des idées contestables. Or, c’est l’expression de ces besoins qui mettra sur la piste de possibles accords pour une raison simple : même lorsque des revendications sont apparemment incompatibles, les besoins qui les sous-tendent ne le sont pas nécessairement. Il faut donc permettre à chacun d’exprimer ses besoins, ce qui suppose de créer un cadre de (relative) confiance par l’écoute et le respect. L’étape suivante consiste à rechercher ensemble comment rendre compatible la satisfaction de ces besoins en procédant pour cela en deux temps : accueillir d’abord toutes les idées possibles (phase de brainstorming), puis les sélectionner en fonction de leur acceptabilité et de leur faisabilité (phase de sélection).
Etre exigeant envers le problème, bienveillant envers les personnes
Dans un tel processus, pas question de lâcher trop vite pour céder à la pression des plus virulents, ni d’écarter ces derniers pour faciliter la recherche d’un consensus entre ceux qui sont les plus conciliants. Pas question non plus d’éviter « les sujets qui fâchent » et de tenter de nier les désaccords. La démarche doit rester exigeante (traiter les problèmes sur le fond, trouver une sortie par le haut) et inclusive (n’écarter personne). Cela n’empêche pas de faire preuve de respect envers chacun, de veiller à bien comprendre sans juger, de manifester de l’empathie, d’être clair sur ses propres besoins. Peu à peu se crée une ambiance dans laquelle les participants apprennent à traiter leurs désaccords sans les personnaliser, dialoguent sans s’interrompre, s’engagent dans une rémarche de recherche de solutions en comptant sur les autres plutôt qu’en s’opposant à eux.
Médiation ou négociation dans les processus de concertation
Les principes de la médiation ou de la négociation raisonnée peuvent s’insérer dans la plupart des processus de concertation. Cela est particulièrement justifié dans les cas où l’enjeu est conflictuel. Par exemple, l’animateur peut prévoir dans son dispositif de dialogue :
– avant toute réunion, des entretiens individuels systématiques avec les principaux acteurs impliqués, permettant de cerner les enjeux, de commencer à connaître leurs besoins, d’identifier les conditions du dialogue acceptables pour eux ;
– lorsque le conflit a déjà éclaté et laissé des traces, une phase initiale de « vidage de sac », familière aux médiateurs, qui est parfois salvatrice mais qui doit être préparée (par des entretiens bilatéraux) et qui doit être suivie de debriefings individuels ou collectifs ;
– un séquençage des réunions autour des étapes suivantes : exposé des revendications (points de vue initiaux) de chacun, approfondissement du diagnostic si nécessaire (collecte de données, visites, mobilisation d’experts…) et objectivation de la situation, identification des points d’accord et de désaccord, exposé des besoins, recherche de solutions, sélection et choix des actions à mettre en oeuvre.
– un travail sur ses propres compétences : neutralité, capacité à gérer les situations difficiles…
Une fois que le dispositif a été conçu et préparé, deux grandes activités démarrent en parallèle :
- L’animation du dispositif : assurer l’articulation entre les instances de pilotage et les groupes de concertation et assurer le lien entre le dispositif et son contexte de réalisation,
- L’animation des groupes de concertation ou collectifs de travail.
L’animation du dispositif
La mise en place d’un dispositif de concertation nécessite de mobiliser les acteurs concernés par le sujet traité. L’identification de ces acteurs – avec le commanditaire – et leur rencontre – au cours d’entretiens préalables – permet de connaître leurs préoccupations, leurs contraintes et leurs souhaits en matière de concertation. Ce travail d’identification permet d’associer les acteurs concernés et de préciser les modalités du dispositif notamment d’un point de vue pratique (jours et horaires des réunions, circulation de l’information…) voire d’ajuster le résultat attendu (évaluation du niveau de tension existant entre les acteurs). En fonction du dispositif, le groupe de concertation pourra être ouvert ou non, afin d’associer de nouveaux acteurs en cours de concertation et de multiplier les points de vues, ou au contraire de privilégier la dynamique de travail créée au sein du groupe composé initialement.
Au fil de la concertation, l’animateur du dispositif aura le souci d’informer régulièrement les parties prenantes (rédaction des comptes-rendus…) et plus largement de communiquer sur l’avancée du travail engagé (réunions publiques, rencontres, mobilisation des relais…) en vue – notamment – de créer des liens entre le dispositif de concertation et les autres programmes d’actions locaux et de sensibiliser les habitants, riverains, usagers du territoire. Il devra également veiller à constamment maintenir le lien entre l’instance de concertation et l’instance de décision afin de garantir la prise en compte des propositions finales par les décideurs.
L’animateur du dispositif est le garant de l’avancée de ce projet (suivi des étapes, respect de l’échéancier). Il se doit donc d’alerter le commanditaire dès qu’il perçoit des points d’achoppements et de réfléchir avec celui-ci à des propositions d’ajustement ou de réorientation éventuels. Car nous évoquons bien ici des dispositifs dynamiques pour lesquels la logique de progression prévaut sur la logique de planification. Il peut également avoir un rôle d’accompagnateur auprès du commanditaire, des partenaires et des parties prenantes du dispositif pour souligner le chemin parcouru et les aider à se projeter sur la suite du travail à conduire. Enfin, il est le garant de la participation des parties prenantes. Il s’assure que les instances décident démocratiquement et communiquent sur leurs choix.
Enfin, l’animateur du dispositif de concertation a pour rôle de faciliter les différentes prises de décision. L’animation proposée (débat, vote…) ainsi que les supports de travail fournis (relevé de décisions, mise en forme des propositions énoncées…) vont permettre aux participants – tour à tour – de choisir, évaluer, décider, abriter, et ce de façon démocratique (recherche du consensus).
L’animation des groupes de concertation ou collectifs de travail
L’animateur de la concertation n’est pas porteur d’un objectif en termes de résultat, d’action à conduire, mais uniquement garant du cadre de l’échange. Il intervient principalement avec une obligation de moyens (et non de résultat) pour permettre l’expression – au même niveau – de chacun des participants, sans présager de ce qui pourra résulter de ces échanges en instaurant un climat d’écoute, de respect mutuel et de bienveillance entre les acteurs présents.
Les taches à remplir par l’animateur
Les 3 fonctions de l’animateur
Quelle posture ?
L’attitude de l’animateur au cours des réunions est un déterminant important dans le déroulement de la concertation. Il existe différentes formes d’animation, qui diffèrent en fonction de la personnalité de l’animateur et du contexte, en particulier du degré de conflictualité dans les échanges.
De façon générale, on peut dire que plus une situation est tendue, plus l’animateur devra être présent, rappeler le cadre et structurer les échanges. Dans un contexte tendu, l’animation-pivot peut s’avérer utile. On parle de l’animateur pivot de la parole. Les idées sont données à l’animateur par un participant. C’est l’animateur qui redonne la parole au groupe en lien avec l’idée émise ou pour relancer les échanges à l’aide d’un nouveau questionnement.
On parle ici d’une posture d’écoute active et de la mobilisation de différentes techniques au service de l’animateur : la reformulation, le questionnement (ouvert et non inductif), la synthèse…
Dans un contexte peu conflictuel, une présence plus légère de l’animateur peut être suffisante.
Dans tous les contextes, il est nécessaire de préparer avec soin l’animation de la réunion en veillant à ce que :
- un déroulement de la réunion soit prévu,
- les tâches essentielles soient attribuées : l’animation, la prise de notes et l’apport de connaissances (le cas échéant),
- la logistique soit anticipée : tables/chaises, matériel informatique, impressions des supports de travail en nombre suffisant, outils adaptés à l’animation prévue (papiers, feutres, gommettes, enveloppes..) afin de faciliter le travail des participants.
D’autres critères peuvent se rajouter pour vous permettre d’évaluer si la présence de l’animateur dans la régulation des échanges doit être plus ou moins forte :
- nature de la production demandée au groupe (créativité, argumentaire, choix…) qui va plus ou moins rechercher le débat sur les idées,
- composition du groupe et taux de mixité des points de vue qui pourrait nécessiter d’être vigilant à ce que des idées originales ou uniques au sein du groupe soient entendues, prises en compte ou à l’inverse qu’un groupe n’exprime pas que des évidences, des idées convenues.
Animer et participer à la fois ?
Bien souvent dans les démarches de concertation, les animateurs sont également parties prenantes du processus. Or la nécessité de neutralité, d’impartialité de l’animateur – mise en avant précédemment – reste indispensable. Même si sa structure est impliquée dans la démarche, l’animateur se doit de conserver le recul nécessaire à sa fonction.
Pour cela, des biais doivent être trouvés. Il est souhaitable qu’un autre représentant de la structure portant l’animation de la concertation soit présent, au même titre que les autres participants. La co-animation peut aussi permettre un relais dans les positionnements entre animation du dispositif et participation.
Dans tous les cas, si l’animateur est amené à apporter la position de sa structure, il doit être très clair avec les participants en précisant quand il parle au titre de sa structure ou au titre de sa fonction d’animation. Cette posture est plus délicate mais reste une pratique courante.
Sur la plus-value de la co-animation, voir le film « Dialoguer pour un SAGE dans le Velay«
Gérer les moments difficiles
En fonction du sujet traité et du niveau de conflit entre les participants, l’animateur d’une concertation peut être confronté à des situations délicates. Il doit toutefois conserver une posture de neutralité par rapport aux arguments avancés par les protagonistes, ainsi que d’écoute, même s’il est directement pris à partie.
La gestion de ces moments de tension s’acquiert. Il peut être utile à l’animateur d’anticiper les types de situations auxquelles il peut être confronté ainsi que les attitudes à adopter en fonction de celles-ci.
Les outils de l’animateur
Il existe de nombreux outils et méthodes d’animation qui permettent de faire avancer le groupe, de produire des propositions, voire de prendre des décisions. Toutefois, il convient d’être vigilant sur l’utilisation de ces outils et d’avoir bien en tête la nécessité de les adapter au contexte, publics concernés et objectifs visés.
Autrice : Alexandra VILLARROEL
Les conditions pour être légitime. Évolution de la légitimité
Pour le bon déroulement des réunions de concertation, il est nécessaire que l’animateur soit reconnu comme légitime par l’ensemble des acteurs. Cette reconnaissance lui permettra d’assurer sa fonction de régulation, d’organisation des échanges de façon optimale, sans que ses interventions soient remises en questions par les participants.
Plusieurs éléments peuvent assoir la légitimité de l’animateur :
- Le mode de nomination et de rétribution : en cas de concertation, l’animateur dépend de la légitimité que peut avoir sa structure à piloter la concertation. Celle-ci, même si impliquée et portant des positions propres, doit avoir montré sa capacité d’écoute des autres acteurs. L’intervention d’un tiers extérieur pour l’animation ne résout pas forcément les problèmes de légitimité puisque, son travail étant rémunéré par une ou plusieurs structures impliquées, il doit également montrer qu’il n’est pas soumis aux décisions de celles-ci.
- L’attitude : neutralité, impartialité, indépendance. L’animateur de la concertation doit avant toute chose faire la preuve, dans ses méthodes et interventions, de ses compétences professionnelles. C’est avant tout la façon dont il conduira les débats, dont il favorisera l’expression de chacun, dont il reformulera et appuiera la reconnaissance de la diversité des opinions, qu’il gagnera en légitimité.
- La connaissance du sujet, du contexte, du processus décisionnel. L’animateur doit pouvoir répondre aux questions des participants tant sur le fond (sans forcément être expert du sujet) que sur la forme (durée de la démarche, processus de validation, reprise des propositions faites par le groupe). Cela suppose aussi une certaine proximité et confiance entre l’animateur et le commanditaire, afin que l’ensemble de la démarche soit transparente en interne et avec les parties prenantes.
- Quelle place pour l’animateur expert ? Une expertise de l’animateur de la concertation sur le sujet abordé ne doit pas lui faire perdre de vue que sa fonction se concentre bien sur le fait de faciliter l’expression des participants. Dans ce cas, sa légitimité tiendra au fait qu’il réussisse à apporter des précisions techniques lorsque cela s’avère nécessaire pour la progression du groupe, sans empiéter sur l’élaboration collective des propositions.
Autrice : Alexandra VILLARROEL
On distingue deux grandes fonctions :
- d’une part la conception, préparation et animation du dispositif de concertation
- d’autre part l’animation des différents temps de travail dans ce dispositif.
Ces fonctions se situent à l’intersection entre des compétences d’animation, de gestion de projet et d’expertise.
Des compétences d’animation…
- Gestion du groupe : répartition de la parole, régulation des tensions, écoute active…
- Organisation des réunions : ordre du jour, compte rendu, prises de décision, conditions logistiques pour faciliter le travail du groupe
- Communication : s’exprimer devant un groupe, faire parler et faire émerger, garantir un confort d’écoute et d’expression
- Méthode : savoir mobiliser des outils participatifs en adéquation avec les publics et objectifs
- Régulation du dispositif
- Facilitation des prises de décision au sein des instances
Des compétences en gestion de projet…
- Méthodes de diagnostic de territoire
- Mobilisation des acteurs locaux
- Organisation technique, administrative et financière des actions / du projet
- Lien entre l’instance de dialogue, les instances de pilotage et les partenaires extérieurs (information des parties prenantes)
- Lien entre le dispositif et son contexte de réalisation
Une expertise méthodologique et technique
De la concertation…
- Définition, objectifs, enjeux d’une concertation
- Analyse de la demande d’intervention (relation avec le commanditaire)
- Définition des instances et des étapes d’une démarche de concertation et leur articulation
- Conception d’une progression de séquences de travail au regard du mandat confié au groupe de concertation
- Passage des positions aux besoins
- Évaluation du processus de concertation
Du thème abordé…
Comme évoqué précédemment, l’animateur de la concertation n’est pas forcément expert du sujet abordé. Toutefois, il doit avoir un minimum de connaissances relatives au thème, afin de pouvoir comprendre les positionnements des acteurs, voire d’apporter quelques connaissances pour réguler les échanges.
Voir la fiche : Place et rôle de l’animateur de concertation
Comment acquérir ces compétences ?
Pour progresser dans pratique d’animation de concertation, plusieurs pistes:
- Réaliser tous les parcours de ce site !
- Des ressources bibliographiques et notes de lecture
- Des organismes qui peuvent vous proposer des formations
Comment consolider ces compétences dans la durée ?
Il s’agira pour l’animateur de consolider et d’actualiser régulièrement ses connaissances dans le domaine des dispositifs participatif (veille documentaire, participation à des événements et des formations, participation à un ou des réseaux professionnels…).
Autrice : Alexandra VILLARROEL
Le dialogue territorial et, d’une manière générale, la concertation visent à aboutir à des propositions construites collectivement par un groupe qui permettent de satisfaire au mieux les besoins de chacun. Souvent cela s’obtient au bout d’un long processus de travail collectif dans lequel l’animateur cherche à favoriser la pleine participation de chacun. Il peut donc lui être utile de connaître et de prendre en compte ce dont des individus ont besoin pour bien fonctionner dans un groupe.
Ces besoins ont été théorisés et décrits par William SCHUTZ, psychologue américain, dans un ouvrage et une méthode appelés « L’élément humain ».
De notre point de vue d’animateur de groupe de concertation, notre objectif est d’offrir un cadre et des méthodes de travail permettant que chaque participant
- prenne sa place pleine et entière et accepte la participation pleine et entière des autres…
- De façon constructive et efficace, en mobilisant toutes ses compétences et en reconnaissant les compétences des autres,
- En exprimant ses besoins réels et en écoutant sincèrement les besoins des autres.
Ces trois qualités correspondent aux 3 besoins fondamentaux décrits par SCHUTZ sous les termes d’Inclusion, de Contrôle et d’Ouverture. Ce sont les trois besoins d’un individu dans un groupe.
L’inclusionLe besoin d’inclusion est le besoin fondamental de se sentir reconnu comme membre du groupe, de se sentir important aux yeux des autres. Il répond à la peur du rejet.
Pour l’animateur, l’enjeu est que chacun trouve sa place et se sente appartenir à un groupe qui va travailler ensemble pendant plusieurs séances.
Comment peut-on le favoriser ? L’accueil par l’organisateur et l’animateur de la réunion (qui ne sont pas toujours la même personne) est la première occasion de donner une place à chacun. On peut veiller à être disponible à ce moment, pour accueillir physiquement chacun, échanger quelques mots, faire connaissance. Mais l’inclusion va surtout pouvoir se faire avec l’ensemble du groupe.
Le tour de table « classique » est la forme minimaliste de l’inclusion. Selon la taille et le vécu commun du groupe, plusieurs écueils sont possibles. Le tour de table long et fastidieux dans un grand groupe peut être stressant, impressionnant et devenir un espace de prise de pouvoir par l’étalage que certains font de leurs titres ou de leurs revendications. C’est pourquoi il peut être utile de consacrer un temps spécial à l’inclusion, en proposant une activité simple, plus ou moins ludique selon le public, en grand ou en petits groupes…
Speed-meeting, jeu du bingo, présentation en mouvement, dominos humains par ordre alphabétique, météo personnelle, présentation par l’intermédiaire d’un portrait chinois ou du photolangage… De nombreux outils d’animation existent, plus ou moins « disruptifs »… Un outil facile à utiliser même avec des participants non habitués des animations participatives est de demander à chacun de raconter une anecdote personnelle parlant de son « lien avec le sujet », en un temps très court. Il peut alors se produire des moments de grâce comme lorsqu’un participant révèle qu’il a rencontré sa femme sur la champ de foire qui doit devenir un ensemble d’immeubles ou que des élus racontent comment ils jouaient enfants dans les bras du Rhône sauvage…
Si l’on garde à l’esprit l’objectif de l’inclusion qui est de permettre à chacun de se sentir à sa place dans cette réunion, de se sentir important, de rassurer sa peur d’être rejeté, l’activité proposée ne doit mettre personne en difficulté. Ainsi les jeux nécessitant un contact physique (se prendre par la main, se faire guider avec une main dans le dos…) sont à utiliser uniquement avec des groupes qui ont déjà un bon niveau de confiance et d’ouverture.
L’inclusion cependant n’est pas uniquement renforcée par ce temps de lancement devenu habituel pour de nombreux animateurs.
L’inclusion fait aussi référence à la notion même de groupe et de la conscience de ses frontières. Plus les frontières du groupe sont claires, plus il sera facile de se sentir appartenir au groupe et donc d’être inclus. Elles se définissent par la raison d’être du groupe (sa mission) et ses critères d’appartenance. Ainsi, il est important de bien préciser le sujet et les objectifs de la concertation ou de la réunion et d’être clair sur les raisons de la présence de chacun, expliquer pourquoi on invite telle et telle personne. Cela peut être fait efficacement lors des entretiens individuels.
En fin de séance, un temps de « déclusion » permet de clore l’espace-temps privilégié de la réunion sans sentiment d’inachevé, même si le travail n’est pas terminé et que d’autres séances doivent suivre. Une activité courte de clôture est une façon de consolider le sentiment d’appartenance au groupe : tour de parole pour partager son état d’esprit, citer une chose que l’on a apprise, ou une surprise…
Le Contrôle
Le deuxième besoin formalisé par W. SCHUTZ est le contrôle. Il correspond aux besoins de se sentir compétent, en capacité d’agir sur son environnement et d’être responsable. Il permet à la personne de se sentir en sécurité, en connaissance des règles, en responsabilité.
Plusieurs éléments favorisent le contrôle :
- Avoir un cadre clair : les horaires de début ET de fin, des objectifs clairement affichés, des règles de fonctionnement, la connaissance du processus complet et en particulier du processus décisionnel,
- Solliciter et reconnaître les compétences des participants, les responsabiliser, sur le fond et la forme. Reconnaître les compétences sur la forme, cela peut être de déléguer aux participants des tâches liées à l’animation (gardien du temps, rapporteur, prise de notre, régulation de la parole…)
- Valoriser et célébrer les avancées, les productions pour renforcer le sentiment de compétence collective.
Avec des groupes amenés à travailler ensemble sur un temps long, il nous arrive de proposer des tours de parole où chacun exprime une compétence qu’il se reconnaît et qu’il pense être utile au projet. On peut même aller plus loin en demandant aux participants de reconnaître mutuellement en binôme une compétence chez l’autre. Ce type d’animation peut servir d’inclusion.
Il est important que le Contrôle soit partagé dans le groupe. L’animateur ou le décideur ne doivent pas être les seuls à connaître les règles, les objectifs, à être responsable du résultat. Plus le Contrôle est développé dans le groupe, plus celui-ci sera responsable du respect du cadre et efficace dans l’avancée du travail. Il sera donc très important dans les phases de choix de solutions et de décisions.
Dans les situations les plus tendues, lorsque des conflits sont présents, le besoin de Contrôle devient primordial. Selon les situations, on choisira d’insister et de développer en premier soit l’Inclusion soit le Contrôle.
L’ouverture
L’inclusion et le contrôle sont prioritaires et indispensables avant de chercher à favoriser l’Ouverture.
C’est le troisième besoin d’un individu dans un groupe.
L’Ouverture est la capacité et le besoin de se connecter à ses sentiments, ses émotions, ses aspirations profondes, à une dimension intime de soi. C’est le besoin de se sentir aimable, aimé et aimant. C’est elle qui permet de reconnaître et d’accepter ses vulnérabilités, sans se sentir en danger sous le regard des autres. Dans le dialogue territorial, c’est elle qui permet à chacun d’exprimer ce qui est vraiment important pour lui, de passer des positions à l’expression des besoins.
L’ouverture permet de mobiliser les capacités créatives de la personne, au service du groupe et du projet, d’oser les idées « farfelues ». Dans les phases de recherches de solution, un groupe qui a atteint un niveau d’ouverture élevé a plus de chances de trouver des idées originales, nouvelles et adaptées.
Un haut degré d’ouverture permet aussi de réguler plus facilement les conflits. L’Ouverture est en quelque sorte la conscience que chaque personne est aimable inconditionnellement et donc de faire la différence entre la personne et les idées, les propositions, les intérêts qu’elle exprime. Dans ces conditions, on peut donc être en conflit sur les idées, en désaccord sur les solutions proposées, sans dommage pour l’estime de soi et de l’autre.
Comment développer l’Ouverture dans un groupe ? C’est certainement le plus délicat pour un animateur.
En premier lieu, en prêtant une forte attention à l’Inclusion et en étant très rigoureux sur le Contrôle, que l’on crée les conditions favorables à l’Ouverture, qui finalement se produit toute seule. Elle a besoin d’un cadre extrêmement sécurisant pour s’épanouir de façon spontanée.
Cependant, on peut la favoriser en invitant les participants à s’ouvrir sur leurs ressentis, sur ce qui est vraiment important pour eux. L’écoute active et bienveillante de l’animateur, modélisante pour les autres participants, sera facilitante. Il est possible d’introduire des questions touchant à l’Ouverture dans les tours de parole d’inclusion et de déclusion. Par exemple, un tour de parole pour dire sa météo personnelle en début de séance est une invitation à l’ouverture.
Inclusion, Contrôle, Ouverture ne vont jamais l’un sans l’autre et permettent de libérer la puissance et la créativité d’un groupe. Cette notion issue du coaching d’équipe est tout à fait adaptée aux situations de concertation et démarches participatives, à partir du moment où l’on anime un processus mettant en action un groupe qui se retrouve plusieurs fois autour d’un sujet commun. Pour aller plus loin sur cette notion, il existe des formations spécifiques Elément Humain
Auteur : David CHABANOL
Instance de concertation et instance de décision
Une instance de concertation débat d’un sujet, émet des propositions d’actions et définit des alternatives qu’elle proposera ensuite à l’instance de décision. Ce sont bien 2 instances distinctes même si leur composition peut se rejoindre. Il est d’ailleurs souhaitable de veiller à associer des représentants de l’instance de concertation à l’instance de décision sans pour autant la rendre trop lourde. En effet, l’instance de décision est souvent pléthorique ; elle rassemble des élus, parfois des techniciens (direction générale, services techniques, chargés de mission concernés…), des partenaires institutionnels (Etat, collectivités supra-territoriales, organismes financeurs, chambres consulaires…), des acteurs socio-économiques du territoire (entreprises ou club d’entrepreneurs, coopératives, associations de commerçants, représentants de l’économie sociale et solidaire…) et des syndicats voire des habitants dans certains Agenda 21 locaux. Sa composition, son mandat et ses règles de fonctionnement doivent être déterminés dès la conception du dispositif de concertation. Elle sera souvent pilotée par l’élu référent du projet voire le Maire de la commune ou le Président du Syndicat, ce qui lui confère une certaine importance et assure le lien entre les différentes instances de la collectivité concernée.
Les termes varient : une instance de concertation peut prendre le nom de « groupe de travail », « groupe de travail thématique », « espace de concertation »… Une instance de pilotage prend – elle – souvent la forme d’un « comité » ou d’un « groupe de pilotage ». Ces instances peuvent être créées de toutes pièces dans le cadre de la concertation ou bien s’inscrire dans des instances déjà existantes : pour les 1ères il peut s’agir d’une commission extra-municipale, du conseil de quartier, du conseil des sages… et pour les secondes : du conseil municipal, de la réunion de majorité, de la commission locale de l’eau…
Il faut cependant avoir à l’esprit que pour tout projet de concertation, ce sont les élus qui exprimeront la décision finale et c’est l’instance « supra » qui formalisera cette décision, à savoir le Conseil municipal, le Conseil communautaire, le Comité syndical… Ainsi dans les faits, l’instance de pilotage – créée dans le cadre d’un nouveau projet de concertation – ne prend pas la décision finale mais constitue une sorte de « passage intermédiaire » entre l’instance de concertation et l’instance de décision « supra ». Son rôle sera alors de trier, prioriser, chiffrer, évaluer les propositions d’actions avant qu’elles ne soient présentées à l’instance de pilotage « supra ». Cette instance de pilotage intervient pour apporter les éléments d’aide à la prise de décision par les élus.
Rendre compte des décisions
Dans le cadre de notre démocratie représentative, les élus ont la responsabilité de la prise de décision finale mais ils ont également la responsabilité d’en rendre compte et notamment auprès des acteurs qui ont contribué à l’élaboration des propositions soumises aux arbitrages. Il convient d’informer des décisions prises en les argumentant. Les acteurs, les habitants, les usagers sont tout à fait en mesure de comprendre et d’accepter les choix et/ou les priorisations faits par la collectivité qui ne pourra pas tout embrasser ni mettre en œuvre dans le même temps. Cela relève d’une forme de « déontologie de la participation » de veiller à rendre compte – au plus grand nombre – des arbitrages réalisés sous forme d’un « avis argumenté », tout comme il sera important ensuite de communiquer sur l’avancée de la mise en œuvre du projet.
Pour plus de détail, voir Rendre compte, évaluer, capitaliser
La décision finale est formalisée au travers d’un accord qui peut prendre différentes formes : un avis argumenté, un programme d’actions, des grandes orientations stratégiques… Il existe également des choix « intermédiaires », élaborés au fil du processus de concertation. Différents niveaux se distinguent :
Lorsque les membres de l’instance de concertation clarifient le thème et déterminent collectivement le périmètre du sujet à traiter : de quoi s’agit-il ? Qu’entend-on par : « Comment entretenir et aménager la rivière (rives et lit) en tenant compte des différents usages or usages industriels ? »
Lorsque les membres de l’instance de concertation déterminent des axes de travail/champs thématiques/problématiques spécifiques et définissent plus précisément leur objet de travail. Pour faire suite à l’exemple cité ci-dessus : « Dans les usages nous distinguerons les usages agricoles et ceux des particuliers ».
Enfin lorsque les membres de l’instance de concertation choisissent ce qui va être communiqué à l’issue du travail : quelles réflexions, quelles données seront partagées largement ? Est-ce que tout ou partie de la production du groupe sera rendu visible à l’issue des séances de travail ?
Une formalisation finale prenant la forme d’un accord peut à la fois préciser les éléments sur lesquels les participants de l’instance de concertation se sont accordés mais aussi les éléments encore clivants, non tranchés et sujets à désaccords. Un groupe de travail peut tout à fait conclure qu’il n’a pas réussi à trancher, en tout cas pas sur tous les sujets. Ces éléments – loin de représenter un échec du processus de concertation – sont autant d’éléments d’aide à la décision pour les élus en capacité alors de prendre la mesure des clivages présents sur leur territoire et d’arbitrer en conséquence (poursuite de la réflexion, appel à une médiation…).
Faire des choix, trouver un accord
Le choix peut s’appuyer sur les techniques de vote : vote à l’aide de cartons ou de gommettes de couleurs, votes simple ou pondéré. Ces techniques peuvent permettre de faire ressortir les idées les plus partagées et d’écarter les idées les moins plébiscitées par les acteurs ou également de hiérarchiser ces idées en les listant en fonction du nombre de gommettes obtenues par chacune. La priorisation/hiérarchisation des actions peut se faire de différentes manières. Nous préconisons d’inviter les personnes à le faire individuellement en répondant à la question « Qu’est-ce qui vous semble prioritaire ? Qu’est-ce qui vous paraît être le plus important ? » et en leur demandant ensuite de partager leurs critères de choix pour se mettre d’accord sur une liste de priorités : « Qu’est-ce qui a motivé votre choix ? En quoi cette action est prioritaire pour vous ? ». Les arguments apportés alors seront autant d’éléments d’aide à la décision pour les élus. Le travail peut se réaliser en utilisant des grilles, des « radars », des « baromètres ». Ces outils peuvent être déjà existants ou créés en fonction du contexte du territoire et des enjeux du projet. Ils peuvent aider les participants à réfléchir mais ils sont avant tout un support pour permettre la discussion autour des priorités de chacun, et non une fin en soi. Au final, la priorisation peut prendre la forme d’un échelonnement dans le temps (à court, moyen ou long terme) ou se faire au regard d’autres critères tels que : la faisabilité technique, la faisabilité financière, l’urgence pour le territoire, la capacité de cette action à mobiliser largement, l’identification d’un porteur de projet potentiel…
Il convient de rappeler que toute décision se fait en fonction du mandat donné à l’instance concernée, mandat qui doit être défini et validé – dès son lancement – par tous les protagonistes du processus de concertation. L’animateur/médiateur de la concertation sera le garant – au fil du temps et des avancées du dispositif de concertation – du respect de ce mandat.
Autrice : Cecile MALFRAY
Un processus de concertation conduit à la formalisation d’un accord. Ce dernier peut prendre différentes formes : une stratégie organisée en axes de travail pour le territoire, un programme d’actions décliné en fiches actions détaillées, une liste de propositions/de pistes d’amélioration pour répondre à une problématique prégnante du territoire…
Rédiger un accord
Généralement, la rédaction de cet accord reprend le contexte du projet, son déroulement dans le temps (étapes de la concertation), précise les différentes instances mises en place et leurs compositions respectives et rend compte des propositions finales validées par l’ensemble des membres de l’instance de concertation. Il peut indiquer à la fois les éléments d’accord et les points de désaccords sur lesquels l’ensemble du groupe n’a pas trouvé de consensus ni de compromis. Il importe de préciser ces éléments et les débats qui ont animé le groupe pour rendre compte – notamment à l’instance de décision – de la complexité du sujet traité, de la diversité des positions et rappeler la coexistence d’intérêts contradictoires relatifs au sujet.
Un accord va permettre de formaliser le travail réalisé par l’instance de concertation, de rendre compte de la progression de la réflexion et de son aboutissement, de valoriser l’implication des acteurs (liste des participants) et de permettre à chacun (participant, commanditaire, décideur) de prendre connaissance des résultats du travail collectif. Qu’est-ce que cela a produit de mettre tous les acteurs concernés autour de la table, de les faire réfléchir et travailler ensemble pour résoudre une problématique commune, en ayant à ce sujet des intérêts parfois très contradictoires ?
Au final, l’accord doit permettre aux membres de l’instance de pilotage d’arbitrer en se basant sur des propositions ou des réflexions précises, étayées. Ils pourront choisir de conserver telle proposition et d’en écarter une autre, ou bien d’imaginer des propositions alternatives en s’appuyant sur le travail fourni.
Tant sa forme que son contenu seront toujours fonction du résultat attendu au lancement du dispositif de concertation. Le niveau de précision visé doit permettre de calibrer le nombre de séances de travail. Ainsi, on ne programmera pas les mêmes temps de travail si l’on cherche à obtenir une liste d’actions, ou si l’on veut aboutir pour chaque action à une « fiche action » détaillée (contexte, objectifs visés, public cible, échéances, budget prévisionnel, maître d’œuvre…). De la même manière, si le nombre de séances de travail fixé est faible (2 ou 3 séances avec le groupe), l’animateur de la concertation ne pourra pas être trop ambitieux sur le niveau de détail visé dans le document définitif.
Un accord doit être signé par l’ensemble des membres de l’instance de concertation attestant qu’ils se reconnaissent dans la version définitive du document. L’animateur de la concertation joue donc un rôle important : il garde la trace des échanges et des productions du groupe au fil des réunions, il assure leurs mises en forme pour valoriser, donner du sens et du corps au travail produit et il finalise un document final fidèle aux réflexions menées durant tout le processus de concertation et qui va permettre aux élus de décider des suites à donner (mise en place, réajustement, suppression de telle ou telle action…).
L’animateur, garant du respect des propos échangés
L’animateur est garant du respect des propos échangés. Il ne diffusera un compte-rendu à des personnes extérieures au groupe de concertation qu’après avoir obtenu l’accord des membres de celui-ci et il n’acceptera pas de prendre en compte des modifications proposées par des personnes n’ayant pas participé au travail collectif. Le fait de respecter la parole des participants et d’être fidèle aux échanges est un élément de motivation important pour les membres d’un groupe de travail. C’est aussi un gage de sérieux et cela contribue à la création d’un climat de confiance et de coopération au sein de l’instance concernée.
Trop souvent on propose à des acteurs, des habitants, des usagers de prendre part à un processus de concertation sur un sujet qui les préoccupe, leur tient à cœur… sans donner suite aux réflexions menées. En préalable au lancement du dispositif de concertation, le commanditaire et l’instance de pilotage du projet doivent s’engager à examiner les éléments qui seront produits et à prendre en compte les propositions formulées dans l’accord final. Ils ne s’engagent pas – bien sûr – à toutes les valider en l’état mais la notion d’examen / de prise en compte / de lecture bienveillante est essentielle. Si le commanditaire souhaite pouvoir continuer à mobiliser les acteurs autour de projets futurs, il doit – pour chaque dispositif mené – se contraindre à rendre compte de façon accessible (fond et forme) des arbitrages pris par l’instance de pilotage et à communiquer régulièrement sur l’avancée de la mise en œuvre du projet défini.
Autrice : Cecile MALFRAY
Rendre compte, c’est produire un bilan de la concertation, destiné aux participants ou à des tiers (le grand public, les médias, des institutions…). C’est généralement l’affaire de l’initiateur de la concertation. C’est une démarche qui est réglementairement obligatoire dans certaines situations et hautement recommandable dans toutes les autres.
Ce que dit la loi
La législation n’oblige pas à évaluer la concertation, mais elle peut obliger à en rendre compte :
- La réalisation d’un bilan de la concertation préalable à l’enquête publique doit être joint au dossier d’enquête publique (article L.300-2 du Code de l’urbanisme et article L.123-12 du Code de l’environnement)
- La publication d’une synthèse des observations du public avec mention de celles « dont il a été tenu compte » est nécessaire lors de toute consultation du public (loi du 27 décembre 2012, article L120-1 du Code de l’environnement)
- le respect a posteriori des engagements pris à la suite des concertations, notamment vis-à-vis des riverains, est inscrit dans les bilans LOTI.
- A la fin des débats publics organisés par la Commission nationale du débat public, il est nécessaire d’établir un bilan du débat, tout comme dans les cas de concertations recommandées ou de concertations post-débat public.
Compilation et synthèse
Nous recommandons, dans l’optique de rendre compte d’une concertation :
1) De compiler, dans un fichier numérique ou sur support papier, l’ensemble des documents relatifs à la concertation pour constituer un « Dossier de la concertation » le plus exhaustif et fidèle possible, constitué par exemple :
– D’une mise à plat du processus de concertation (objectifs, dispositif mis en place, sujets abordés, calendrier, lieu et date des réunions, nombre de participants, etc.)
– D’un bilan qualitatif (arguments échangés, climat et évolution des échanges, points d’accord et de désaccord, recommandations ou propositions, suites à donner)
– Le cas échéant, la ou les décisions prises (qui doivent être publiées séparément) ou le calendrier décisionnel
Et en annexe :
– Des études et expertises (études de contexte, synthèse des entretiens préalables, études techniques, ec.)
– Des comptes-rendus de réunions (réunions publiques, ateliers, réunions de Comité de pilotage, etc.)
– Des documents d’information diffusés, des communiqués de presse et éventuellement de coupures de presse
– De photos et vidéos illustrant la concertation
– Le cas échéant, du (des) rapport(s) des tiers-garants ou d’évaluateurs, de la charte de la concertation
– Etc.
Ce dossier peut être transmis aux partenaires institutionnels, tenu à disposition de ceux qui en feront la demande et/ou être téléchargeable sur le site de la concertation. Il peut être inclus dans le dossier de l’enquête publique (dans certains cas, il doit l’être). Il peut servir de base à la rédaction du document suivant.
2) De rédiger un document synthétique de quelques pages, appelé « Bilan de la concertation » qui sera plus activement diffusé (il peut être notamment envoyé à tous les participants). Ce bilan peut faire état du déroulement de la concertation, de ses acquis, de ses limites, des suites qui seront données. Il permet de remercier les participants et de les informer des étapes suivantes. Il peut être soumis aux participants et validé ou amendé par eux. Qu’il soit collectif ou rédigé par un organisme, ses auteurs doivent être clairement identifiés (exemple: «La concertation sur… : bilan de la Communauté de Communes de…»).
Auteur : Pierre-Yves Guihéneuf
Évaluer
L’évaluation va plus loin que le fait de rendre compte, elle permet d’émettre un jugement et de porter le regard sur certains points spécifiques. Les démarches d’évaluation de la concertation sont relativement nouvelles et font encore l’objet de recherches et de tâtonnements.
Quoi évaluer ?
L’ADEME suggère de définir 5 critères d’évaluation de la concertation :
- La pertinence : dans quelle mesure le processus de concertation mis en œuvre répondait-il à un besoin?
- L’efficacité : les objectifs ont-ils été atteints (cela implique que les objectifs de départ soient clairs et définis) ?
- L’efficience : les moyens ont-ils été bien employés (pas de gaspillage) ?
- La cohérence : dans quelle mesure les ressources mises en œuvre sont-elles cohérentes avec les objectifs fixés ?
- L’impact : les effets constatés de la concertation répondent-ils au problème identifié au départ par les porteurs de la concertation ? Y a t il des effets non voulus ou non anticipés ?
On peut évaluer ses effets sur le projet, sur la décision, sur les acteurs, leurs pratiques, leurs relations, leurs projets… Évaluer ces effets (y compris les effets imprévus) n’est pas toujours facile mais des méthodes existent (voir les documents recommandés ci-contre).
Pourquoi évaluer ?
Il est possible d’évaluer en continu pour réajuster le processus de concertation (diffusion de questionnaires d’évaluation aux participants, entretiens ciblés, etc.). Il est également utile d’évaluer pour tirer un bilan en faire progresser collectivement les participants. Plusieurs chercheurs ont en effet montré que les processus de concertation sont des « espaces d’apprentissage » et que, sur un même territoire, ces acteurs les remobilisent pour progresser au cours de diverses concertations successives. Enfin, évaluer contribue à renforcer la transparence et à resserrer les liens entre les partenaires.
Capitaliser
La capitalisation permet à des organismes ou des réseaux pour qui la concertation constitue un exercice récurrent, de consolider des apprentissages et de garder la mémoire de ses expériences. Elle peut prendre plusieurs formes :
- l’archivage de documents et leur mise à disposition pour le personnel en charge de la concertation (modèle de rapports, de documents, de courriers, etc.) si possible accompagné de commentaires ou de suggestions pour les personnes en charge des concertations suivantes.
- les retours d’expériences (Rex ou Retex), généralement sous forme de témoignages des personnes en charge de la concertation et destinés à aider leurs collègues.
- des réunions de capitalisation (debriefing en cours de processus ou ex post) au sein des équipes concernées (animateurs, chefs de projets, élus ou dirigeants…) afin de tirer collectivement des enseignements d’une expérience.
Pour aller plus loin
ADEME, La concertation en environnement, éclairage des sciences humaines et repères pratiques, juin 2011.
Jean-Eudes Beuret, Noémie Dufourmantelle, Valérie Beltrando. L’évaluation des processus de concertation : RELIEF, une démarche, des outils, la Documentation française, 2006.
Paul Carriot et Myriam Mérad. Évaluer la concertation dans le domaine des risques et de l’environnement. Éléments méthodologiques, AFITE, 2015.
ICPC – Institut de la concertation et de la participation citoyenne. L’évaluation de la participation, principes et recommandations. 2022.
Auteur : Pierre-Yves Guihéneuf
Limiter les changements climatiques, prévenir la crise écologique : cela fait consensus dans notre société, mais les controverses pour y parvenir sont extrêmement vives. Ces controverses sont palpables dans l’espace public et médiatique, mais également dans les dispositifs participatifs ayant trait à la transition énergétique, à la gestion des forêts, aux déchets et à de nombreux sujets ayant une dimension scientifique et technique.
Lorsque ces controverses prennent une tournure conflictuelle, les animateurs et facilitateurs de dialogue peuvent se sentir dépourvus face à la défiance envers les experts. Il y a parfois de la confusion entre les opinions, les besoins et les savoirs des différents participants. La diffusion sur Internet et par les réseaux sociaux d’informations, sorties de leur contexte et sans indication de leur source, voire de fake news, peut brouiller le débat.
Un manque de confiance mutuel
D’un côté, on constate une perte de confiance de certains citoyens dans la parole des scientifiques et des experts. De l’autre, ces derniers ont rarement donné du crédit à d’autres types de savoirs que les leurs.
L’environnement est un univers d’expertise et cette expertise est surtout issue des sciences de la nature, des sciences de l’ingénieur, de l’aménagement ou du droit. Les détenteurs de connaissances spécialisées (issus de cursus et de filières formelles) ont une parole, un statut d’autorité. Leurs connaissances ont une légitimité particulière. Cette position dominante a souvent, dans notre pays, entraîné la négation et le mépris d’autres formes de savoirs et de leurs détenteurs, qu’il s’agisse des savoirs paysans sur les pratiques agropastorales et agroécologiques, de l’expertise d’usage des habitants sur leur quartier, ou des malades et de leurs familles sur les maladies et les traitements.
Autrice : Julie Riegel
Les sciences
Les sciences diffèrent les unes des autres par leurs objets, leurs méthodologies, leurs critères de validation, mais elles ont en commun de construire des connaissances par l’organisation collective des controverses scientifiques. Une proposition scientifique n’acquiert le statut de connaissance qu’à la suite d’un long examen par des pairs, lequel s’effectue à la lumière des travaux historiques et contradictoires effectués par d’autres scientifiques sur ce même objet.
L’exposé de leur démarche de travail par les scientifiques (hypothèses de départ, cadre théorique d’analyse, méthodes et limites de traitement des données…), est indispensable pour la crédibilité des résultats et des conclusions de leurs travaux dans leur champ disciplinaire.
La fiabilité scientifique est compromise si les travaux des scientifiques ne sont plus mis à l’épreuve de la discussion critique de leurs pairs, que ce soit pour des raisons de spéculation commerciale (dépôt de brevet) ou de pressions de partenaires (publics ou privés) pour l’obtention rapide de résultats.
Les sciences génèrent ainsi des connaissances fiables, mais qui sont incomplètes, jamais figées, et qui donnent lieu à de nouvelles interrogations, dont les chercheurs s’emparent.
L’expertise
L’expertise peut s’appuyer sur des connaissances scientifiques mais aussi juridiques, médicales, administratives, professionnelles, empiriques etc. L’étymologie du mot « expert » rappelle que la compétence de ce dernier se fonde avant tout sur un savoir-faire, acquis à force d’expérience : l’expertus latin, tiré du verbe experiri, est celui « qui a fait ses preuves, qui a de l’expérience, qui est habile » (Calafat, 2011).
Alors que le rôle du scientifique dans la Cité est de partager un état des connaissances et des incertitudes dans son domaine de compétences, le rôle de l’expert est plutôt requis pour donner un avis sur une action à entreprendre ou une décision à prendre. L’expert n’est pas là pour éclairer un problème dans sa globalité ni pour inviter au doute, mais pour mettre ses compétences au service d’une situation précise.
De la reconnaissance sociale des connaissances scientifiques ou techniques des experts est née la notion d’expertise, entendue comme le recours à une analyse compétente dans des situations contentieuses ou incertaines. Dans ce contexte, les processus de légitimation des compétences expertes, ainsi que les conditions de sollicitation d’une expertise appellent à des règles formalisées et transparences pour éviter des conflits d’intérêts.
En outre, tout expert va adosser son avis à des connaissances, mais qu’il va sélectionner selon sa lecture des enjeux, et transposer à la situation qu’il a en charge d’expertiser. D’où l’importance de ne pas limiter l’expertise à la sollicitation d’un bureau d’étude, d’un représentant administratif, ou d’une personne spécialiste, mais de concevoir l’expertise comme une démarche collective, s’appuyant sur une pluralité d’experts.
Savoirs locaux, savoirs d’usage…
Jusqu’aux années 1980, les savoirs élaborés en-dehors d’un cadre scientifique n’étaient pas envisagés comme des savoirs. Certes, agronomes, anthropologues ou géographes recueillaient dans différents pays des connaissances auprès de paysans, de pêcheurs, de pasteurs nomades ou d’autochtones amérindiens, mais ces personnes étaient considérées comme des « informateurs », pas comme des détenteurs de savoirs à part entière. Les premiers travaux d’ethnosciences, ainsi, à la même période, que les acteurs du développement endogène et de l’auto-gestion des paysans, démontrent que ces connaissances non scientifiques constituent des savoirs à part entière. Ces connaissances permettent en effet de donner sens à des informations et des événements hétérogènes, de construire une représentation du monde cohérente, et de guider l’action.
La terminologie désignant ce type de savoirs est hétérogène et varie d’un secteur, d’un pays et d’une époque à l’autre : les acteurs des politiques publiques et de la démocratie participative utilisent souvent le terme d’expertise d’usage ou citoyenne. Dans le champ environnemental et territorial, on rencontre plutôt les termes de savoirs vernaculaires ou savoirs locaux. Cette dernière appellation se prête bien à la désignation de savoirs ruraux relatifs aux espaces et aux ressources naturelles. Dans tous les cas, ces savoirs ont la spécificité d’être peu énoncés, mis en discours, car ils sont avant tout « exercés », c’est-à-dire mis en pratique dans un contexte socioécologique donné.
Autrice : Julie Riegel
Les courants de pensée positivistes postulent que seule la science peut décrire le monde réel, d’autres propos pouvant apporter des idées, des sensibilités, qui sont légitimes mais pas objectifs. A l’opposé, les courants de type relativistes avancent que toutes les connaissances sont idéologiques et subjectives, que les sciences ne peuvent prétendre dire la vérité. Les praticiens du dialogue territorial, dans leur posture d’animation de la concertation, considèrent simplement qu’il y a différentes façons de questionner le monde, de construire de la connaissance et de lier celle-ci à l’action.
Etre ouvert à différents types de savoirs
La philosophe des sciences Isabelle Stengers nous invite à respecter différents types de savoirs et à retrouver le sens commun, c’est-à-dire la capacité de construire du sens en commun. Cela ne signifie pas se convaincre et « tomber d’accord », mais accepter d’écouter l’autre et de se laisser affecter par ce qu’il dit. Michel Serres, autre philosophe des sciences, se garde également de parler de la Science comme une conquérante de la Vérité, mais appelle à relégitimer les sciences dans leur pluralité, avec leurs vérités et leurs incertitudes.
Pour ces scientifiques, aucun savoir n’est légitime à faire taire les autres. L’enjeu d’un monde commun est de construire des savoirs « entre » et non des savoirs « sur » les questions et les problèmes que nous avons collectivement à résoudre.
Des dispositifs de dialogue démocratiques requièrent donc à la fois une expertise plurielle et l’échange entre différents types de savoirs. Une telle approche est démocratique, et a aussi le mérite d’être efficace et d’impliquer le partage des responsabilités lorsque des décisions complexes sont en jeu. Mais dans une démarche de dialogue, si tous les points de vue des participants sont légitimes, et peuvent bénéficier d’une écoute et d’une considération égales de la part de l’animateur, le partage de savoirs nécessite de la pédagogie, de la traduction, et du temps !
Accompagner l’échange de savoirs en concertation est en effet complexe. Certains savoirs se partagent plutôt sous forme de courbes, de cartes, de chiffres, de démonstrations théoriques. D’autres s’expriment sous forme de gestes, d’expérimentations in situ ou de récits. Des démarches concrètes de mise en dialogue des savoirs (voir le compte-rendu de l’atelier organisé par Comédie en octobre 2020) montrent que les savoirs locaux ne sont pas dissociables des lieux, des environnements, et des contextes de vie dans lesquels ils se sont construits. La compréhension de ces savoirs est autant intellectuelle que sensible. Elle nécessite de l’observation et de l’immersion. On pense parfois que ces savoirs sont a priori plus accessibles et diffusables à tout un chacun que les savoirs scientifiques et techniques. Mais ce n’est pas le cas : il est difficile de les décrire et de les rendre accessibles à des non-spécialistes des activités et des espaces qu’ils concernent. Des expériences de recherche participative révèlent également que les compétences des citoyens peuvent soutenir et enrichir la production de connaissances scientifiques, par les questions fondamentales qu’ils peuvent élaborer dans un cadre approprié et par leur aptitude à mettre en œuvre ou améliorer des protocoles de collecte de données.
Regard d’un témoin
Afin d’enrichir ces réflexions, nous avons sollicité un témoin qui a été confronté à des controverses techniques dans le cadre d’un dispositif de dialogue : Michel Badré a fait partie de la commission en charge d’organiser et d’animer le débat public de 2019 sur les déchets radioactifs, sous égide de la Commission nationale du débat public (CNDP). Dans ce type de débat à forte composante technique, alors que les échanges entre experts ne sont pas toujours à la portée du plus grand nombre, quelle place donner aux controverses techniques ? Comment distinguer connaissances techniques, valeurs et opinions personnelles ? Peut-on parler d’indépendance des experts ?
Autrice : Julie Riegel
L’apport de connaissances joue un grand rôle dans la concertation pour permettre la compréhension des problèmes et la recherche de solutions. A l’inverse, la concertation peut orienter utilement les études techniques. On pourrait donc penser que la concertation et l’expertise sont faits pour se compléter. En fait, ce n’est pas toujours le cas. L’intégration d’expertises techniques dans un processus de dialogue ne va pas de soi. Dans ce domaine, de nombreuses difficultés ont été rapportées par des praticiens mais il existe peu de retours d’expériences formalisés et très peu de recherches. C’est un chantier en cours. Nous proposons ici quelques pistes de réflexion et quelques expériences sur ce sujet.
Premier enjeu: le langage et les savoirs
Dans les concertations à fort contenu technique, où des experts interviennent ou bien où des études sont mobilisées pour alimenter la réflexion, les groupes sont composés de personnes dont les niveaux de connaissance sont très hétérogènes et qui ne se comprennent pas toujours bien. Certains peuvent avoir tendance à se taire par crainte de paraître peu compétents, d’autres peuvent disqualifier les remarques de ceux qu’ils considèrent comme des profanes. Le langage devient aussi un piège : des participants utilisent un jargon qui n’est pas compris par tout le monde et qui souligne les inégalités entre les participants, ils utilisent les mêmes mots avec des sens différents, ou au contraire des termes différents pour dire la même chose. Enfin, les savoirs dits « empiriques » (non académiques) sont souvent mal reconnus et l’expertise des participants est négligée alors qu’elle pourrait constituer une ressource.
Derrière toutes ces difficultés, il y a un enjeu de dialogue entre des personnes avec des niveaux de connaissance et des registres de connaissance différents. Cet enjeu appelle une attention particulière de la part de l’animateur.
Deuxième enjeu: le statut de l’expertise
D’un côté, certains experts tendent à présenter leurs études comme fournissant des vérités, alors que les données ou les modes de calcul sont parfois incertains, peu précis et reposent sur des hypothèses non explicitées. D’un autre côté, certains participants tendent à invoquer le parti-pris des experts sous prétexte qu’ils sont rémunérés par tel ou tel organisme, alors que cela n’est pas toujours justifié. Que la fiabilité et l’impartialité de l’expertise soient remis en cause dans un processus de concertation est inévitable et cela fait partie du jeu. Il est possible d’organiser, dans le cadre de la concertation, un débat sur les expertises, voire de réaliser des contre-expertises. Cela ne constitue pas un investissement perdu : ce travail de consolidation collective de ce que l’on sait et de ce que l’on ne sait pas permet très souvent de partir sur des bases qui ne seront plus contestées et de gagner du temps par la suite.
Mais il faut aussi se poser la question plus générale du rôle de l’expertise dans la prise de décision : quand est-elle nécessaire et quand ne l’est-elle pas ? On a parfois du mal à reconnaître qu’il faille décider dans un contexte de connaissance imparfaite et on préfère se donner un illusoire sentiment de sécurité. N’est-il pas préférable d’identifier les certitudes et les incertitudes afin de faire des propositions plus pertinentes ? Intégrer les incertitudes dans un processus de concertation peut faire partie de la méthode.
Troisième enjeu : l’articulation de la concertation et des études techniques
Trop souvent, les commanditaires de processus de concertation confient une mission d’animation du dialogue à leurs services ou à un prestataire, et une mission d’expertise technique à d’autres services ou d’autres prestataires, sans que les articulations entre ces deux missions soient véritablement étudiées. Même quand ces deux missions sont réunies en une seule et confiées à un prestataire unique, elles sont souvent distinguées dans la commande et prises en charge par un groupement qui mobilisera des personnes aux compétences différentes pour ces deux composantes de la mission. Or, un processus de concertation et un processus d’expertise, s’ils sont conduits parallèlement, peuvent amener à formuler des propositions différentes, voire antagoniques. Alors, les expertises techniques doivent-elles être mises au service du dialogue ou au contraire, la concertation doit-elle fertiliser une réflexion en premier lieu technique ?
Auteurs : Pierre-Yves GUIHENEUF ICPC et Philippe BARRET Geyser
La concertation s’inscrit à la fois dans des pratiques sociales, qui lui ont donné naissance et où elle prend tout son sens, et dans des textes législatifs et réglementaires. Ceux-ci traduisent les innovations qui naissent sur le terrain, se font l’écho des aspirations de la population et s’en font également les relais et les démultiplicateurs. Elle évolue donc dans un contexte particulier et mouvant. la lecture de ce contexte diffère selon les analyses mais des constantes s’imposent : demandes sociales de participation, amélioration des pratiques, effacement de l’Etat, montée des conflits d’environnement…
Contexte et enjeux de la concertation : entretiens avec Loïc Blondiaux, Laurent Mermet, Etienne Ballan, Laurence Monnoyer-Smith.
La connaissance des textes réglementaires est utile mais celle-ci ne prend sens qu’à partir d’une connaissance de l’histoire qui permet de relier le contexte, l’évolution des idées, les avancées de la pratique, le rôle des technologies…
Une brève mise en perspective historique qui retrace les grandes étapes de l’apparition des pratiques et des interrogations, puis de leurs traductions législatives
Les années soixante et soixante-dix : pratiques de résistance rurale et de lutte urbaine
Il est difficile de situer précisément l’apparition des pratiques de concertation et de participation, mais c’est probablement dans les années soixante que les premières impulsions significatives sont données. Les innovations ou les questionnements apparaissent dans différents champs.
Dans des territoires ruraux soumis à l’exode ou à de lentes dépressions économiques, la mobilisation d’associations et d’habitants s’organise autour de la création d’emplois et d’activités, de la mise en place de groupes locaux d’habitants et de l’élaboration collective de projets. Ce mouvement ascendant et empirique sera rapidement fertilisé par les apports méthodologiques et conceptuels de nouvelles approches, comme celle de développement endogène ou encore d’écodéveloppement, l’ancêtre du développement durable. La contestation des démarches descendantes est la règle mais les élus locaux s’allient souvent à ces démarches locales structurées autour du « faire ensemble ».
En milieu urbain, à la fin des années soixante, s’expriment aux Etats-Unis et en Europe les premiers signes de ce qu’on appellera « la démocratie participative ». Malgré le contexte économiquement favorable des Trente Glorieuses, la contestation politique gagne divers milieux. En France et en particulier dans la région de Grenoble, se mettent en place des groupes d’action municipaux, des ateliers populaires urbains, des commissions extra-municipales… A la différence des initiatives nées dans le monde rural, les mouvements urbains ne visent pas la mise en place de projets par les habitants eux-mêmes, mais plutôt l’expression de leurs attentes par les autorités publiques locales. L’éducation du citoyen et l’émergence de contre-pouvoirs comme rempart aux tendances autoritaires et à l’opacité de la décision publique sont au cœur des motivations. Le mot-clé en est : « participation ».
Enfin, les décennies soixante et soixante-dix seront celles de conflits d’aménagement d’ampleur nationale, notamment autour de la centrale nucléaire de Plogoff ou du projet d’extension du camp militaire du Larzac. A Roubaix, le conflit de l’Alma-Gare (1966-1983), au cours duquel des habitants s’opposent à la rénovation brutale de leur quartier, voit émerger un fort mouvement de contestation des experts et une demande de reconnaissance de la compétence des habitants.
Les années quatre-vingts : premières traductions législatives
Dans la France des années quatre-vingts, le pouvoir encore fortement centralisé multiplie les initiatives de consultations, notamment de représentants de la société civile. C’est l’époque des Commissions (souvent départementales) comme celle des sites et de l’environnement.
A partir de 1983, l’enquête publique est généralisée. Mais cette procédure se révèle vite insuffisante et ne désamorce pas les contestations environnementales, qui prennent de l’ampleur et débouchent parfois sur des conflits violents.
Les années quatre-vingt-dix : des changements d’ampleur
Cette décennie verra plusieurs initiatives législatives d’ampleur dans le domaine de l’environnement.
En 1992, la loi sur l’Eau instaure les Commissions locales de l’eau, organes décentralisés composés d’élus, de représentants de l’Etat, d’usagers, de professionnels et d’associations, qui sont chargées, dans le cadre des Schémas d’aménagement et de gestion des eaux (SAGE), de faire des propositions en matière de gestion et de protection des ressources hydriques. Il faut prendre la mesure de cette innovation, à une époque où il revenait d’abord à l’Etat de se dresser au-dessus des intérêts partisans pour définir le bien commun. En confiant ce rôle à des groupes composés d’acteurs locaux – mais dont les pouvoirs publics ne sont évidemment pas exclus – et en créant les conditions d’un véritable dialogue en leur sein, on s’inscrit clairement dans le champ de la concertation et non plus dans celui de la consultation.
La même année, la Circulaire Bianco pose le principe d’un débat ouvert au public avant tout grand projet d’aménagement. L’idée est inspirée d’une expérience québécoise, celle du Bureau des audiences publiques pour l’environnement créé en 1978. Elle sera confirmée en 1995 par la création de la Commission nationale du débat public, qui deviendra autorité administrative indépendante en 2002 et diversifiera progressivement ses modes d’action.
Du fait de cette production législative, l’environnement devient, au cours des années 1990, un domaine privilégié d’application des principes de la concertation. Mais toutes les pratiques ne sont pas suscitées par la réglementation et, sur le terrain, d’innombrables expériences de concertation se mettent en place à l’initiative des acteurs locaux, que ce soit pour prévenir ou traiter des conflits, pour gérer des ressources naturelles, pour élaborer des conventions et des programmes, etc. En 1996, le ministère de l’Environnement élabore une Charte de la concertation qui en définit quelques principes.
Les années deux-mille : l’environnement, la santé, l’industrie, la ville…
Au cours de cette décennie, l’environnement reste un domaine d’importance. En 2002, la France ratifie la Convention internationale d’Aarhus, qui oblige à garantir aux citoyens « les droits d’accès à l’information sur l’environnement, de participation […] au processus décisionnel et d’accès à la justice en matière d’environnement ». En 2005, la Charte de l’environnement « adossée à la Constitution » reconnait le principe de participation et en 2007, le Grenelle de l’Environnement innove en créant un dispositif national de co-construction de lois sur l’environnement.
Mais la concertation trouve des traductions législatives et règlementaires dans d’autres domaines. En 2002, le concept de démocratie sanitaire est inscrit dans la loi. En 2003, les Comités locaux d’information et de concertation (CLIC) sont mis en place dans les bassins industriels à risque. La même année, le Code de l’Urbanisme impose la concertation « pour tout aménagement modifiant substantiellement le cadre de vie ou l’activité économique d’une commune » et les collectivités territoriales peuvent organiser des référendums locaux ayant valeur décisionnelle.
Les années deux-mille-dix : prévention des conflits et professionnalisation
Durant cette décennie, les évolutions sont incertaines. D’un côté, la permanence de la crise et le souci de simplification des procédures tendant vers un allègement des obligations législatives au profit d’incitations moins contraignantes. Les bilans tirés des pratiques des années passées militent pour une recherche de qualité autant (sinon plus) que de quantité, ce qui invite à préférer la « soft law » et la montée en compétence des acteurs concernés.
De l’autre côté, les aspirations de la société civile envers la participation restent aussi fortes que l’est la défiance envers les élus et les experts, ce qui fait considérer la concertation comme un moyen de rendre plus transparent le processus décisionnel et de créer des liens. Le retour des conflits environnementaux (aéroport de Notre Dame des Landes, barrage de Sivens, centre d’enfouissement de déchets nucléaires de Bures, centre de loisirs de Roybon, centre commercial Europacity…) milite vers un renforcement du dialogue comme outil de prévention des crises. Cela se traduit notamment dans les ordonnances d’août 2016 qui insistent sur la nécessité de renforcer le dialogue en amont des projets, d’assurer une certaine qualité des processus de dialogue en encourageant ou – dans certains cas – en imposant la présence de garants et, enfin, d’offrir aux citoyens un droit d’initiative, c’est-à-dire de demander l’organisation de concertations.
Autre fait marquant de cette décennie : la critique des « corps intermédiaires » qui vient du champ politique invite les praticiens à mettre en avant la figure du citoyen, de l’habitant, de l’individu dans les processus de dialogue. Ce qui introduit une complexité dans les dispositifs à grande échelle. Quels citoyens ? Sont-ils représentatifs du reste de la société ? Comment faire dialoguer des profanes avec des « semi-experts » que sont les responsables associatif ou professionnels ? De nombreux dispositifs de dialogue territorial s’adaptent cependant pour donner une place aux participants à titre individuel.
Enfin, la concertation et la participation se structurent comme des espaces de professionnalisation : développement des formations et montée en compétences des praticiens, multiplication des agences de conseil, structuration d’un marché de prestations, organisation d’un champ de recherches, apparition d’associations et de réseaux de praticiens, etc.
Les années deux-mille-vingt
La décennie précédente se ferme avec le Grand débat national (2019) qui fait suite au mouvement de protestation des Gilets Jaunes ; celle-ci s’ouvre avec la Convention citoyenne sur la climat (2020-2021) qui réunit 150 citoyens tirés au sort. Ces deux initiatives nationales, différentes dans la forme, ont en commun de mettre la participation citoyenne sur le devant de la scène. Les pratiques se diffusent notamment au sein des collectivités, avec des effets de mode (les budgets participatifs, le tirage au sort…)
Le début de la décennie confirme également la plus grande attention donnée au « simple citoyen » dans les dispositifs participatifs, une tendance déjà amorcée durant la décennie précédente.
Des textes qui posent des exigences d’information, de concertation ou de participation : un récapitulatif chronologique
1978 | Loi du 17 juillet 1978 | Principe d’une liberté d’accès aux documents administratifs et amélioration des relations entre l’administration et le public |
Légifrance | ||
1981 | Circulaire du 5 février 1981 créant les contrats de rivière | Création des contrats de rivière qui encouragent la recherche de consensus entre acteurs locaux pour la gestion concertée des cours d’eau. |
Agence de l’eau | ||
1981 | Décret du 12 mai 1981 créant les CDSE | Le décret du 12 mai crée les Commissions départementales des sites et de l’environnement qui intègrent notamment des élus, des représentants de l’Etat et des associations. Elles ont un rôle consultatif dans des opérations industrielles, minières, touristiques, etc. |
Légifrance | ||
1983 | Loi Bouchardeau portant sur la démocratisation de l’enquête publique et la protection de l’environnement | La loi du 12 juillet 1983 crée la forme actuelle de l’enquête publique. Auparavant (depuis 1807) réduite à l’information des propriétaires en cas d’expropriation, elle vise désormais à collecter des avis. |
Légifrance | ||
1992 | Déclaration de Rio sur l’environnement et le développement | Selon le principe n°10, « la meilleure façon de traiter les questions d’environnement est d’assurer la participation de tous les citoyens, à un niveau qui convient ». La Déclaration de Rio crée l’Agenda 21, plan d’actions qui décrit les domaines où le développement durable doit s’appliquer. |
Conférence des Nations Unies sur l’Environnement et le Développement | ||
1991 | Convention d’Espoo sur l’évaluation de l’impact sur l’environnement (EIE) dans un contexte transfrontière | Le paragraphe 8 de l’article 3 prévoit que les parties concernées (les Etats frontaliers) veillent à ce que le public soit informé des projets susceptibles d’avoir un impact sur l’environnement et ait la possibilité de formuler des observations ou des objections, dont il faut tenir compte. |
Unece | ||
1992 | Loi ATR relative à l’administration territoriale de la République | La loi du 6 février 1992 énonce dans son article 10 le droit des habitants des communes à être consultés sur les questions qui les concernent, inaugurant ainsi une série de textes dans ce domaine. Elle instaure également la consultation au niveau municipal. |
Légifrance | ||
1992 | Circulaire Bianco relative à la conduite des grands projets nationaux d’infrastructure | La circulaire du 15 décembre 1992 confie aux préfets la responsabilité d’associer les responsables régionaux et locaux, politiques, économiques, sociaux et associatifs, aux différentes phases de réalisation des grandes infrastructures décidées par l’Etat. |
Légifrance | ||
1992 | Loi sur l’eau instaurant les Schémas d’Aménagement et de Gestion des Eaux (SAGE) | Le SAGE est un dispositif de gestion des ressources en eau et des milieux naturels liés aux cours d’eau, basé sur la concertation au sein des Commissions Locales de l’Eau (CLE). |
Agence de l’Eau | ||
1995 | Loi Barnier relative au renforcement de la protection de l’environnement | La loi du 2 février 1995 crée la Commission Nationale du Débat Public (CNDP), modernise l’enquête publique et améliore le statut des associations de protection de l’environnement. |
Wikipédia | ||
1996 | Charte de la concertation du Ministère de l’environnement | Cette charte souhaitée par la ministre de l’Environnement Corinne Lepage n’est pas contraignante. Elle promeut la participation et le débat public, insiste sur la concertation dès l’amont des projets, propose des règles pour animer la concertation dans de bonnes conditions. |
1998 | Convention d’Aarhus établie par l’UNECE (Nations Unies) | Cette convention est organisée en trois grands chapitres : accès du public à l’information sur l’environnement, participation du public à la prise de décisions ayant des incidences sur l’environnement, accès à la justice en matière d’environnement |
Wikipédia | ||
1999 | Loi LOADDT ou Voynet (Loi d’orientation pour l’aménagement et le développement durable des territoires) | La loi du 25 juin 1999 crée les Conseils de Développement dans chaque agglomération et met en place les conditions d’une démocratie plus participative dans les Pays. |
Wikipédia | ||
2000 | Loi SRU (Solidarité et Renouvellement Urbain) | La loi du 13 décembre 2000 impose une concertation préalable à l’élaboration et à la révision des documents d’urbanisme : Plans locaux d’urbanisme et Schémas de cohérence territoriale. Les modalités de concertation sont déterminées librement par les collectivités publiques locales. |
Légifrance | ||
Wikipédia | ||
2000 | Directive cadre sur l’Eau de l’Union européenne | Le Parlement européen adopte la Directive cadre sur l’eau qui demande la participation active des acteurs de l’eau – mais également du public en général – à l’élaboration des plans de gestion des ressources hydriques. |
Union européenne (en) | ||
Wikipédia | ||
2002 | Ratification de la Convention d’Aarhus par la France | Cette ratification ouvre la voie à une traduction réglementaire de la convention d’Aarhus dans le droit français. |
Légifrance | ||
2002 | Plan d’action issu du sommet de Johannesburg pour le développement durable | Parmi les objectifs énoncés figurent ceux de « renforcer la participation et la contribution effectives de la société civile et des autres protagonistes pertinents à l’application d’Action 21, et promouvoir la transparence et une large participation du public » |
Agora 21 | ||
2002 | Loi Vaillant, ou loi relative à la démocratie de proximité | La loi améliore les définitions des principes de droit à l’information et à la participation en matière d’environnement et introduit les conseils de quartier dans les communes de plus de 80.000 habitants. Elle transforme la CNDP en instance administrative indépendante et élargit son champ de compétence. |
Légifrance | ||
2002 | Loi de démocratie sanitaire | La loi du 2 janvier 2002 portant rénovation de l’action sociale et médico-sociale et du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé consacrent le concept de démocratie sanitaire. Par la reconnaissance de droits individuels et collectifs, l’usager devient un acteur du système de santé dans lequel il peut intervenir directement ou par l’intermédiaire de ses représentants. |
Légifrance | ||
2002 | Pratiques de concertation du ministère de l’Equipement | Comme le ministère de l’Environnement en 1996, le ministère de l’Equipement énonce quelques principes de concertation. |
Min. de l’équipement | ||
2003 | Directive européenne | Accès du public aux informations environnementales. Cette directive s’inspire de la convention d’Aarhus et doit être transcrite dans le droit des pays membres. |
Dir.2003/4/CE | ||
EUR-Lex | ||
2003 | Directive européenne | Participation du public lors de l’élaboration de certains plans et programmes relatifs à l’environnement. |
Dir. 2003/35/CE | ||
EUR-Lex | ||
2003 | Loi créant les Comités locaux d’information et de consultation (CLIC) | L’article 2 de la loi du 30 juillet de la loi loi Bachelot-Narquin du 30 juillet 2003 institue des comités locaux d’information et de concertation (CLIC) pour les bassins industriels comprenant une ou plusieurs installations à risque (type Séveso), afin de permettre la concertation et la participation des parties prenantes – notamment les riverains- à la prévention des risques d’accidents.La création, les objectifs, la composition de ces comités sont précisés par en 2005 par le décret relatif à la création des comités locaux d’information et de concertation en application de l’article L. 125-2 du code de l’environnement. |
Légifrance | ||
2003 | Révision du Code de l’urbanisme | La Révision du code de l’urbanisme, article L 300-2 impose la concertation pour tout aménagement modifiant substantiellement le cadre de vie ou l’activité économique d’une commune. |
Légifrance | ||
2003 | Référendum décisionnel local | La révision constitutionnelle du 28 mars 2003 (art. 72-1 al. 2 de la Constitution) dont les modalités ont été précisées par la loi organique du 1er août 2003 autorise toutes les collectivités territoriales, y compris celles à statut particulier et d’outre-mer, à organiser des référendums locaux ayant valeur de décision. |
Légifrance | ||
Vie publique | ||
2004 | Circulaire relative aux contrats de rivière et de baie | Cette circulaire ministérielle du 30 janvier 2004 rénove les Contrats de rivière et crée les contrats de baie. |
Agence de l’eau | ||
2004 | Loi relative aux libertés et responsabilités locales | La loi du 13 août 2004 élargit aux autres collectivités territoriales les droits d’être consultés qui avaient été accordés au niveau municipal par la loi ATR du 6 février 1992. |
Légifrance | ||
2005 | Charte de l’environnement intégrée au préambule de la Constitution | Cette charte adossée à la Constitution, dans son article 7, énonce les droits et les devoirs du citoyen en matière d’environnement, reprenand des principes de la convention d’AArhus. Elle reconnait à chacun le droit d’accéder à l’information détenue par les autorités publiques et le droit de participer à l’élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l’environnement. |
Min. de l’environnement | ||
Wikipedia | ||
2006 | Décret sur les Commissions administratives | Ce décret du 8 juin 2006 est relatif à la création, à la composition et au fonctionnement de commissions administratives à caractère consultatif |
Légifrance | ||
2007 | Directive européenne INSPIRE | Cette directive vise à favoriser la production et l’échange des données localisées dans le domaine de l’environnement pris dans un sens large et d’assurer au public un accès à ces informations. |
Min. de l’Environnement | ||
2009 | Loi Grenelle I Légifrance | Cette loi du 3 août 2009 formalise les engagements du Grenelle de l’Environnement. |
2010 | Loi Grenelle II | La loi prévoit dans son titre V les conditions nécessaires à l’instauration d’une « démocratie écologique », en créant des outils de concertation et d’information au sein des entreprises, des collectivités territoriales et de l’État.Concernant les enquêtes publiques : amélioration des conditions de la participation du public et simplification du droit des enquêtes publiques. |
Loi Grenelle I Légifrance | ||
2011 | Décret relatif à la réforme de l’agrément | Le décret du 12 juillet 2011 réforme la procédure d’agrément et définit des critères de représentativité des associations au sein des instances consultatives. Les seuils définis excluent de fait de nombreuses associations. |
Légifrance | ||
2012 | Loi relative à la mise en œuvre du principe de participation du public défini à l’article 7 de la Charte de l’environnement | Cette loi « prévoit, à titre expérimental, dans le cadre des consultations organisées sur certains projets de décrets et d’arrêtés ministériels (…) d’ouvrir au public la possibilité de consulter les observations présentées sur le projet de texte au fur et à mesure de leur dépôt et, d’autre part, de confier à une personnalité qualifiée, désignée par la Commission nationale du débat public, la rédaction de la synthèse des observations du public ». |
Légifrance | ||
2014 | Loi Maptam | La loi du 27 janvier 2014 de « modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles », dite loi Maptam, dans son article 79 crée les Conseils de développement des pôles d’équilibre territoriaux et ruraux et modifie la loi Voynet de 1999. Voir plus bas la loi NOTRe de 2015. |
Légifrance | ||
Wikipédia | ||
2014 | Loi Lamy de programmation pour la ville et la cohésion urbaine | Suite au rapport Bacqué-Mechmache, la loi de programmation pour la ville et la cohésion urbaine du 21 février 2014 instaure les conseils citoyens dans les quartiers prioritaires de la politique de la Ville. |
Légifrance | ||
Vie publique | ||
2014 | Loi Alur relative à l’accès au logement et l’urbanisme rénové | La loi du 7 août 2015 portant « nouvelle organisation territoriale de la République », dite loi NOTRe, dans son article 88, détermine le cadre des Conseils de développement pour les EPCI et complète ainsi la loi Maptam de 2014. Les dispositions concernant les Conseils de développement sont inscrites dans le Code général des collectivités territoriales (articles L.5211-10-1 et L5741-2). |
Légifrance | ||
2014 | Loi d’avenir sur l’agriculture | La loi d’Avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, n°2014-1170 du 13 octobre 2014 (Art. 1-III) confie au Conseil national de l’Alimentation (CNA) l’organisation de débats publics sur l’alimentation. |
Légifrance | ||
2015 | Loi NOTRe | La loi du 7 août 2015 portant « nouvelle organisation territoriale de la République », dite loi NOTRe, dans son article 88, détermine le cadre des Conseils de développement pour les EPCI et complète ainsi la loi Maptam de 2014. Les dispositions concernant les Conseils de développement sont inscrites dans le Code général des collectivités territoriales (articles L.5211-10-1 et L5741-2). |
Légifrance | ||
Vie publique | ||
2015 | Loi relative à la sobriété, à la transparence, à l’information et à la concertation en matière d’exposition aux ondes électromagnétiques | Il est précisé dans cette loi 2015-136 du 9 février 2015, modifiée en 2016 et consolidée en 2018, Art. 1er, 2-E : «Lorsqu’il estime qu’une médiation est requise concernant une installation radioélectrique existante ou projetée, le représentant de l’État dans le département réunit une instance de concertation, le cas échéant à la demande du maire ou du président de l’établissement public de coopération intercommunale. La composition et les modalités de fonctionnement de cette instance sont précisées par décret» |
Légifrance | ||
2016 | Ordonnance sur la consultation locale | L’ordonnance n° 2016-488 du 21 avril 2016 « relative à la consultation locale sur les projets susceptibles d’avoir une incidence sur l’environnement » autorise l’organisation de référendum locaux et a été établie spécifiquement pour le projet d’aéroport de Notre Dame des Landes. |
Légifrance | ||
2016 | Ordonnance sur la démocratisation du dialogue environnemental | Cette ordonnance n° 2016-1060 du 3 août 2016 sur « l’information et la participation du public à l’élaboration de certaines décisions susceptibles d’avoir une incidence sur l’environnement » renforce la participation du public en amont du processus décisionnel, crée un droit d’initiative des citoyens, encadre l’intervention des garants et modernise l’enquête publique. |
Légifrance.Décret d’application du 25 avril 2017 | ||
Légifrance.Loi de ratification du 2 mars 2018 | ||
Légifrance. | ||
2016 | Ordonnance relative à l’évaluation environnementale Légifrance. | L’ordonnance n° 2016-1058 du 3 août 2016 « relative à la modification des règles applicables à l’évaluation environnementale des projets, plans et programmes » élargit la notion de « projet » et favorise l’évaluation environnementale au cas par cas. |
Décret du 11 août 2016. | ||
Légifrance | ||
2016 | Charte de la participation du public du ministère de l’Environnement | Ce texte publié en 2016 renouvelle la Charte précédente de 1996. Il n’a pas de caractère contraignant. |
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