En 2008, le Conseil Régional Provence-Alpes-Côte d’Azur lançait un nouveau dispositif d’aide à l’innovation, destiné à la fois aux entreprises, aux laboratoires de recherche et aux territoires : PACA Labs.
Sa particularité? Inciter les innovateurs à expérimenter leurs technologies et services numériques et ce, en impliquant des usagers. Conformément à la philosophie des Living Labs qui sous-tend PACA Labs, deux principes d’action majeurs guident en effet le montage des projets :
01. impliquer des usagers en tant que co-concepteurs des innovations, au même titre que les autres parties-prenantes des projets
02. élaborer des expérimentations dites «grandeur nature», implantées dans de véritables situations et contextes d’usage.
Ainsi, ces cinq dernières années, entrepreneurs, ingénieurs, startupeurs, chercheurs mais aussi artistes ont expérimenté leurs innovations dans diverses situations de la vie quotidienne (hôpitaux, stations de ski, offices de tourisme ou universités…), mobilisant par là même une pluralité de communautés d’usagers (infirmiers, pompiers, abonnés de bibliothèques, personnes âgées ou dirigeants d’entreprise…).
Cependant, deux ordres de question ont rapidement émergé et se sont posées de manière récurrente aux porteurs de projet :
01. Qui sont les «bons » usagers ? Comment les identifier et qu’ont-ils à apporter au processus d’innovation? De fait, les innovateurs ne savent pas (ou peu) « travailler avec les usagers » – ce n’est pas leur métier, ils sont d’abord entrepreneurs !
02. Et quand bien même les entrepreneurs sont convaincus de l’intérêt de cette approche «par les usages », comment identifier les «experts » susceptibles de les aider dans cette démarche? Qui sont de ce point de vue les chercheurs en « sciences humaines et sociales » (SHS) qu’il convient de mobiliser? Et quels nouveaux regards peuvent apporter les designers ?
C’est de cette double interrogation qu’est née l’idée de ce guide.
Son but: aider les acteurs qui souhaitent s’engager dans une démarche d’innovation que l’on qualifiera ici d’«ouverte» et de «centrée-usager» à mieux en comprendre le sens, mais aussi à s’outiller en conséquence pour en tirer le meilleur parti.
A l’instar d’autres initiatives du même type, ce guide propose des orientations et des repères afin de permettre une prise en compte effective des usages et des usagers dans un processus d’innovation, qui se veut à la fois « agile» et « itératif ». Il n’a toutefois pas vocation à fournir une énième recette miracle aux innovateurs – cette
perspective est vouée à l’échec !
Et ceci d’autant que demeure une forme d’imprévisibilité consubstantielle aux logiques d’appropriation des biens et des services après leur mise sur le marché ou leur diffusion publique. Il se conçoit plutôt comme une boussole, dont il convient d’adapter les indications à la réalité du terrain et à la physionomie des projets.
Ce guide se base en premier lieu sur des observations empiriques tirées de plusieurs dizaines d’expérimentations menées dans le cadre du programme PACA Labs. Il s’inspire ensuite de nombreux travaux de recherche et de nouveaux modes de pensée, tels que par exemple les démarches engagées par la communauté scientifique des chercheurs en Computer Supported Cooperative Work (travail coopératif assisté par ordinateur – CSCW), dont la particularité consiste précisément à inviter les
sciences humaines et sociales et le design dans le travail de conception. Comme l’indique Dominique Cardon : “ le CSCW est ainsi devenu le lieu d’exploration d’une multitude de méthodologies et de dispositifs visant à établir une « conception centrée-usager», «assistée par l’usage », un design, ou mieux un « co-design», «participatif» ou « évolutif» ” (Cardon, 1997 : 22).
En ce sens, il a vocation à être enrichi dans les années à venir, particulièrement quand il s’agit d’identifier les bonnes méthodes et expertises en Sciences humaines et sociales et en design