« Que les forêts de la guerre deviennent des forêts de la paix » – Entretien avec Laurent Simon, professeur émérite de Géographie physique

Comment laisser un espace forestier de 70 000 hectares en libre évolution durant des siècles pourrait se faire avec, et non contre, la population ?

Alors le premier élément de réponse que j’aurais, c’est que de toute façon, cela ne pourra pas se faire contre la population ! Donc déjà la question se réduit un peu. Aujourd’hui par exemple, pour mettre en place ne serait-ce qu’une réserve ou un parc, il faut l’accord et l’engagement des acteurs locaux, notamment des élus, qui sont quand même au contact et reflètent d’une certaine manière l’avis des citoyens. Il peut y avoir des résistances, il peut y avoir des groupes opposés, mais cela ne peut pas se faire contre. Et puis si l’on veut avoir un projet durable dans le temps, il faut qu’il se fasse sur l’adhésion des populations locales au sens large, c’est absolument essentiel.
Je prendrai un exemple très éloigné de la France. On a beaucoup parlé du mandat de Bolsonaro. Il s’est traduit par une déforestation massive de la forêt Amazonienne. Ce que l’on a moins dit, c’est qu’à côté, il y a une autre forêt très importante au Brésil, la Mata Atlantica, qui a été aussi beaucoup détruite. Or depuis une dizaine d’années, des acteurs locaux, communautés, associations, entreprises, ont un projet de sauvegarde de cette forêt. Eh bien même pendant la période Bolsonaro, elle n’a pas connu de déforestation, mais au contraire une progression. Donc vous voyez, l’acceptation, la prise en charge par les populations est indispensable pour qu’une initiative dure, quel que soit le contexte national ou international.