La Tribune Fonda n°243 de septembre 2019 aborde le thème de la transition énergétique sous l’angle de la participation citoyenne et des coopérations entre acteurs de la société civile pour permettre l’accès de tou.te.s à une énergie propre et d’un coût abordable.
« Cet été, nous avons assisté — impuissants — à un emballement de la planète : canicules à répétition, feux de forêt géants, moussons meurtrières, fonte accélérée des glaciers… Si d’aucuns ont pu croire que le réchauffement climatique concernerait d’abord ses voisins, chacun se rend compte – aujourd’hui – des effets réels sur son propre quotidien : maisons inondées, restrictions drastiques de la consommation d’eau, augmentation du prix des fruits et légumes.
Il ne s’agit plus simplement d’éviter une guerre de l’eau au Proche-Orient ou de lutter contre la famine dans la corne de l’Afrique. Sans actions immédiates et fortes, les conséquences du réchauffement climatique risquent de compromettre de manière irréversible la destinée de notre propre espèce. Nous avons déjà amorcé une révolution géologique impensable à l’échelle d’une vie : sortir de l’ère de l’holocène entamé il y a 11 700 ans pour entrer dans l’anthropocène, après avoir déversé plus de 1400 milliards de tonnes de CO2dans l’atmosphère.
Pourtant, le mot d’ordre « Halte à la croissance » était lancé dès 1972 par le club de Rome. Vingt ans plus tard, la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques « reconnait que les changements climatiques de la planète et leurs conséquences néfastes sont un sujet de préoccupation pour la planète tout entière ». Depuis 1995, les États dialoguent lors des COP pour tenter de trouver une issue positive à ce qui est désormais devenu une crise écologique majeure. Des années que les médias se font l’écho des conséquences de nos comportements collectifs. Des années que l’on nous exhorte à protéger notre environnement. Mais avec quels résultats ?
La signature de l’Accord de Paris en 2015 nous permettait d’espérer de rester sous le seuil des deux degrés préconisé par le GIEC. La défection des USA, sous le mandat de Trump, a douché les espoirs d’une dynamique mondiale favorable en faveur du climat. En France, la crise des Bonnets rouges, et plus récemment des Gilets jaunes, ont montré les limites d’une réponse politique. D’autant qu’une approche purement nationale ne constitue pas en la matière une réponse satisfaisante, alors que les 10 % des habitants les plus riches de la planète génèrent 50 % des émissions mondiales de CO2.
Au regard des investissements massifs que nécessite la transition écologique, les États, seuls, ne peuvent relever le défi ; le changement climatique doit être appréhendé « comme un problème de bien commun » Ce dernier, et son corollaire (perte de biodiversité, pollutions…), ont déjà des effets directs sur nos modes de vie. Il y a désormais nécessité à lier impératif écologique et impératif économique. Si les acteurs économiques n’intègrent pas l’ensemble des externalités négatives de leurs émissions de CO2, alors il n’y a pas de transition écologique qui se tienne.
L’impérieuse nécessité d’agir doit nous pousser à mettre en oeuvre des solutions immédiates, tout en acceptant d’expérimenter et en restant humble. Travailler de concert avec l’ensemble des acteurs, et donc la société civile organisée, est ainsi l’unique condition du succès, en acceptant une approche horizontale où chacun peut partager ses connaissances et expertises. Deux écueils doivent en revanche être évités : l’écoblanchiment et les promesses non-tenues en l’absence d’engagements formels. Et gardons à l’esprit, qu’au-delà du changement des comportements, le véritable enjeu réside dans l’efficacité énergétique : l’énergie la moins chère et la moins polluante est celle que l’on ne produit pas !
L’avenir de la planète nous concerne tous. Aussi, prenons garde à ne pas créer une transition énergétique à deux vitesses avec d’un côté, des énergies propres — donc chères et réservées à une élite —, et de l’autre, des énergies sales et peu chères — réservées aux plus pauvres. L’équitable accès aux énergies est l’une des conditions d’une société juste. Si vous n’en êtes pas convaincus, dites-vous que « les riches qui règnent sur une société en voie d’effondrement s’achètent seulement le privilège d’être le dernier à mourir de faim » »