Le 10 mars 2023 était organisée la deuxième séance du séminaire « L’art de gouverner les transitions ». Consacrée à la gestion de l’eau, son intention était identique à la séance précédente : comprendre les enjeux posés par la transition écologique, de façon à en tirer des leçons plus globales pour gouverner les transitions. Les pistes avancées lors de la première séance sur la forêt pouvaient donc être remobilisées, à condition de tenir compte des spécificités de la ressource en eau.
Parmi celles-ci, citons sa présence nécessaire à la vie – et partant à l’économie et aux territoires. La perspective de sa raréfaction dans les années qui viennent rend sans doute plus tangible l’urgence de la transition écologique. Alors que le défrichage des forêts primaires et tropicales peut encore être vécu en Europe avec distance, les tensions rencontrées aujourd’hui par les sociétés occidentales dans l’accès à l’eau permettent d’appréhender la situation de stress hydrique que vivra un tiers de la population mondiale en 2025 selon l’ONU.
En France, les niveaux de pluies trop faibles ou trop intenses de ces dernières années, combinés à la forte pollution de certaines nappes phréatiques, ont entraîné des difficultés nouvelles d’accès à l’eau, dont certains élus, agriculteurs, industriels ou bien sûr habitants ont pris conscience parfois brutalement. Les contestations vives observées ces derniers mois (au sujet des retenues collinaires ou méga-bassines, de la qualité des eaux, des coupures pour sécheresse, etc.) en sont quelques manifestations, bien que la fréquence et la radicalité avec lesquelles elles s’expriment donnent à penser que se joue là autre chose que de simples conflits d’usages.
Les trois intervenants de cette séance ont voulu mettre en lumière quelques aspects des mutations dont ces conflits étaient porteurs : Corinne Larrue (professeure honoraire à l’UPEC), en les comparant aux conflits d’usage précédents et aux réponses qui y avaient été apportées ; Michel Bisson (Président de Grand Paris Sud), en les traduisant en défis et perspectives pour les politiques territoriales ; Geneviève Leboucher (représentante de Veolia), en soulignant les limites du modèle économique actuel de l’eau. Cette note est la synthèse de ces interventions, ainsi que des réflexions et échanges qu’elles ont suscités.